Souvent présenté comme un humaniste aux opinons idéalistes plus que politiques, Albert Camus, auteur de l’Etranger, s’était prononcé favorable à une Algérie française mais non coloniale.
Pied-noir né en Algérie, fils d’une veuve pauvre et dévouée qui s’éreinte en ménages, élevé à Alger entre une grand-mère sévère et un oncle infirme, Camus brille dans ses études.
Alors que la philosophie lui tend le bras , la tuberculose lui interdit l’enseignement. Il se lance alors dans l’écriture : journalisme, théâtre, romans, essais. Sa série de reportages, « misères de la Kabylie« , sonne déjà comme une mise en accusation des dérives colonialisme. A partir de 1940, Camus vit en France métropolitaine, où il publie l’Etranger, le Mythe de Sisyphe, Caligula, puis après la seconde guerre mondiale, La Peste et Les Justes.
Sa critique des impérialismes, son empathie pour les pauvres, son passé fugace au parti communiste en faisait un compagnon de toute idéale; mais Camus à le tord de ne pas choisir clairement son camps face à la question algérienne, signant ainsi la rupture avec son ami Jean-Paul Sartre et l’intelligentsia du moment.
La position de Camus face à la guerre de révolution algérienne
Dès les premiers jours de novembre 1954, Camus a réduit le FLN à une « bande de terroristes » en donnant à ce terme tout son poids négatif. « L’homme révolté », n’a su voir dans le soulèvement algérien une aspiration à la liberté et à l’indépendance, et n’a pu reconnaître ni accepter le désir fort de Nation, accru par des échecs de 130 ans d’illégitime occupation.
» J’ai essayé de définir clairement ma position. Une Algérie constituée par des peuplements fédérés, et reliée à la France, me paraît préférable, sans comparaison possible au regard de la simple justice, à une Algérie reliée à un empire d’Islam qui ne réaliserait à l’intention des peuples arabes qu’une addition de misères et de souffrances et qui arracherait le peuple français à sa patrie naturelle. »
Ses positions politiques sur le sujet étaient claires : droit à la justice pour les « Arabes », réforme du système colonial, mais transformation qui ne peut se faire qu’en lien étroit avec la France ; il n’y a jamais eu d’acceptation d’une Nation algérienne indépendante.
Albert Camus est désigné en France comme étant le regard lucide, le grand humaniste, celui qui défendit l’espoir d’une « Algérie plurielle». Lorsqu’on ose contester cette figure d’humaniste parfait face à ce conflit, on rappelle immédiatement l’enquête en Kabylie. « Peut-être alors, la meilleure manière de redimensionner la position de Camus dans la question algérienne est de la comparer à celle d’autres Français d’Algérie ou d’autres figures prestigieuses de cette époque, pour ne pas le fixer dans un splendide isolement et le remettre dans l’histoire des idées et des engagements de son temps. « *
Mira B.G
Sources :
- Des hommes dans la tourmente, T. Dary « Le Figaro Histoire »
- Lettre de Feraoun dans Lettres à ses amis, Paris, Le Seuil, 1969, p. 54. La lettre de Camus est dans une collection particulière, citée par Hamid Nacer-Khodja, Albert Camus Jean Sénac ou le fils rebelle, Paris Méditerranée, EDIF 2000
- Pierre Chaulet, « Parti pris », Majallat et-tarikh, Centre National d’Etudes Historiques, Alger, 2ème semestre 1984, pp. 81-107 (Anniversaire du 30ème anniversaire du 1er novembre
- « Albert Camus face à la question algérienne, » par Christiane Chaulet Achour, revue les deux rives de la méditerranée
1 commentaire
Camus humaniste ? Pour la population mondiale certes, sauf pour les Algériens. Depuis sa chronique algérienne en 1958, il a clairement affiché son refus de l’Algérie algérienne. Comme l’a si bien dit Kateb Yacine en parlant de l’auteur de « L’Etranger » : « L’Algérie pour lui se résumait à une image de carte postale ! ». Yacine a tout dit. Camus grand écrivain ? Peut-être. Grand homme ? J’en doute. Esprit colonialiste quand tu nous tient !…