Poète, il enseignait la sociologie rurale depuis une vingtaine d’années à l’Institut national d’agronomie, à El Harrach. Youcef Sebti fut assassiné dans la nuit du 27 au 28 décembre 1993.
« Youcef Sebti a été trouvé chez lui lardé de coups de couteau. Ce matin-là, selon un témoignage, il devait conduire un voyage d’étude dans le Sud algérien. Ses étudiants l’attendaient pour prendre l’avion. Il n’est pas venu, il ne viendra pas », écrit Arezki Metref quelques jours plus tard dans le journal français L’Humanité.
« Dans la nuit du 27 au 28 décembre 1993, dans son appartement de célibataire, sommairement meublé et bourré de livres, abrité par la ferme-pilote de l’Institut National d’Agronomie d’El Harrach, banlieue ouvrière d’Alger, Youcef Sebti est assassiné dans son lit, ‘’frappé par balles à l’abdomen et égorgé’’. C’est le dix-huitième intellectuel algérien victime du terrorisme intégriste’’ », écrit aussi Naget Khadda dans la revue française « Economie rurale ».
Youcef Sebti est né le 24 février 1943, à Boudious près d’EL Milia, dans une famille de la bourgeoisie rurale appauvrie. Après l’école primaire et la médersa à El Milia, le lycée d’enseignement franco-musulman de Constantine, il entreprend des études d’agronomie et de sociologie. Il fait partie de l’une des toutes premières promotions d’ingénieurs agricoles de l’Algérie indépendante.
Il est chimiste puis enseignant à l’école d’agronomie de Skikda, avant d’être professeur de sociologie rurale à l’INA à partir de 1969. Il sera le président du comité des sages de cet institut.
L’un des fondateurs de l’association culturelle El Djahidiyya et son secrétaire général, il écrit régulièrement dans des publications, dont Révolution Africaine.
Mais Youcef Sebti est aussi un grand poète. Auteur d’un seul recueil de poèmes, « L’Enfer et la Folie » édité en 1981, il précisait à chaque fois : « de première jeunesse » (écrit entre 1963 et 1966)
L’une de ses plus belle phrase pour se décrire : «Je suis né dans l’enfer, l’enfer est en moi, Je n’ai pas fait la guerre, elle m’a fait»
Sadek Aïssat le décrit ainsi : «Menu, maigre, le visage émacié, il portait sur ses traits les stigmates mystiques de sa vie intérieure ; car c’est à l’intérieur de lui-même qu’il vivait. Il ne faisait pas de politique, il enseignait la socio, et comme dirait Nazim Hikmet –encore-exerçait le métier de poète, métier de l’exil ».
En 1971, Jean Senac le présentait ainsi : « Youcef Sebti avance dans les labyrinthes d’une sensibilité agressée, trouvant quelque fois une issue dans les revendications de la communauté au travail, (…). L’audace de la poésie, sa plus lumineuse démence fondent ici l’homme et l’expression. La profanation, le blasphème deviennent appel et déjà communication. Solidarité. Si tout est perdu, tout est donc à retrouver et le salut reprend un sens ».
Z.M.
Sources :
- « Youcef Sebti : La force tranquille des mots », par Mohamed Ziane-Khodja, dans Le Jeune Indépendant, février 1999 (et dans des revues de poésie dans plusieurs pays).
- « Youcef Sebti (biographie) », par Naget Khadda, de l’Université d’Alger, dans le numéro 22 de la revue française « Economie rurale » de 1994.
- « La terreur n’est pas aveugle », par Sadek Aïssat. Révolution n°7236 janvier 1994.
- https://ajouadmemoire.wordpress.com/2013/12/27/youcef-sebti-assassine-le-28-decembre-1993/
- « A Youcef Sebti, poète assassiné », par Arezki Metref, dans L’Humanité du 18 Janvier 1994.
- « Il y a 19 ans le poète était assassiné. Youcef Sebti ou le paradis des mots contre l’enfer des maux (1re partie) », contribution du cinéaste Ali Akika dans Le Soir d’Algérie du 24 décembre 2012.