Après s’être attardé sur la pratique thérapeutique de la musique chez les touaregs qui représente la plus ancienne expression de ces rituels, d’autres styles musicaux qui sont parfois nés de la douleur pour exprimer des complaintes communes sur une mélodie minimaliste et une boucle rythmique presque similaire dans sa conception à celle des kel tmasheq.
Cette autre forme de musicothérapie a fait son apparition avec l’arrivée des premiers esclaves venus des pays du sahel et qui étaient généralement acheminé vers le Maroc, la traite humaine qui avait pour plaque tournante des villes de passage de caravaniers comme Tombouctou, Abalessa ou In Salah.
Cette traite humaine avec tout ce qu’elle comporte de souffrances et de déracinement résultat inévitable du déplacement de la population, a donné naissance dans le Maghreb à une nouvelle forme d’expression musicale qui a toujours eu pour but d’extérioriser les affres de l’esclavage subis il s’agit de la musique appelée gnawa au Maroc, diwan en Algérie et stambali en Tunisie et qui partagent beaucoup plus d’éléments que ceux qui les différencient.
Cette musique se pratique depuis des siècles un peu partout en Algérie, surtout dans les régions de l’Oranie, la Saoura et un peu moins à l’est du pays où elle disparait peu à peu, dans un cercle très restreint constitué d’individus qui partagent les même souffrances et qui cherchent à évacuer cela autour d’un rituel mené par des maîtres de cérémonie qui jouent chacun un rôle bien précis.
Au fil du temps cette pratique a beaucoup évolué en se frottant aussi à l’islam, à la langue arabe et au mode de vie du Maghreb pour faire muer ces rassemblements vers une sorte d’organisation sous forme de confréries et de zaouia à travers le pays qui œuvrent pour débarrasser les adeptes et tout ceux qui le désirent de leurs maux autour d’un rituel toujours jalousement gardé.
Autour du goumbri du maâllem, du chant du Koyo bango (chanteur), et du son métalliques des karkabou, les adeptes de la confrérie ou de la zaouia viennent assister au rituel appelé diwan, hadra, lila, mbita ou nechra selon les régions pour écouter une musique qui devrait les porter à la transe, leur faire atteindre un état second par la boucle rythmique, le chant répétitif, les vibrations du goumbri et l’atmosphère mystique qui règne lors de ce genre de cérémonie.
Jusqu’au jour d’aujourd’hui, les zaouia et confréries gardent encore ce legs ancestral très jalousement puisque les cérémonies se passent souvent dans un cercle très restreint autour de quelques anciens mqeddems.
Malgré l’accession du genre musical à la scène et même à la scène internationale et qu’il est souvent subit des modifications de fond pour assurer le spectacle, les mqeddams veillent toujours à perpétuer le rite des anciens et à assurer leur fonction thérapeutique et transmettre leur savoir …
Mohamed Rafik
Retrouvez les premières partie de ce dossier sur Babzman :
https://www.babzman.com/2015/therapie-par-la-musique-une-pratique-ancestrale-en-algerie-partie-i/
https://www.babzman.com/2015/therapie-par-la-musique-les-ceremonies-therapeutiques-chez-les-touaregs-partie-2/
- illustration : Gravure de « Marchands arabes et des esclaves noirs traversant le Sahara »