Babzman
Image default
Accueil » Les habitants d’Alger à l’époque Ottomane : les chrétiens captifs de corsaires déchainés (2eme partie)
Période ottomane (1515 à 1830)

Les habitants d’Alger à l’époque Ottomane : les chrétiens captifs de corsaires déchainés (2eme partie)

LA CONVERSION

La conversion est un moyen pour les captifs accablés, de pouvoir accéder à leur affranchissement. Non seulement ce n’est pas facile, mais contrairement à ce que l’on peut imaginer, pas encouragée, car cet affranchissement va à l’encontre des intérêts de leur propriétaire, qui risquent purement de perdre la rançon, mais aussi les revenus que lui rapportent leur force de travail ; ils doivent donc en contrepartie, s’acquitter envers lui d’une somme compensatoire. D’ailleurs, les deys eux-mêmes s’opposent aux conversions, dans la mesure où cela remet en question les revenus des bagnes et les droits perçus sur les rançons de ces captifs/otages. Les seules catégories sans doute que l’on essaie de convertir sont les enfants et les femmes, car l’on considère que leur conversion est plus aisée. Les enfants sont l’objet de toutes les attentions de leurs maîtres, qui finissent même par les adopter et les considérer comme leurs propres fils. Quant aux femmes captives, si elles sont propriété du Dey, elles rejoignent le harem comme servantes ou concubines. S’il leur arrive de donner naissance à un enfant mâle, elles recouvrent leur liberté et elles peuvent rentrer chez elles, mais si elles désirent rester auprès de leur enfant, elles doivent se convertir.

LES BAGNES

« Ce sont de grands bâtiments, avec de vastes corridors, une cour sale et sombre, des cellules basses pouvant accueillir 15 à 20 personnes chacune, sans lumière, appartenant à l’ÉTAT« . Leur nombre varie en fonction des conjonctures ; Si Haëdo en mentionne deux, dans la deuxième moitié du XVIe siècle, en 1634, Alger compte six bagnes principaux, puis cinq au milieu du XVIIe S , puis en 1675 le nombre est réduit à quatre, et enfin, il n’en reste en 1830, plus que trois.

QUELQUES CHIFFRES DU NOMBRE D ESCLAVES

S’il en est des chiffres opposables, ce sont bien ceux des captifs chrétiens.

Si en 1580, Haëdo a dénombre 25 000 esclaves chrétiens en Alger, le père Dan, un Trinitaire qui se dévoue au sort des captifs, en dénombre 30 000 en 1634. Au XVIIIe siècle, Jean Michel Venture de Paradis, lors de son séjour à Alger de 1788 à 1790, fait état de 1788 esclaves, répartis sur trois bagnes . En 1816 Alger ne compte plus que 1 642 captifs chrétiens et 122 en 1830 . Cette régression du nombre de captifs peut s’expliquer d’abord, par le déclin de la Course, donc de prises, dû à plusieurs facteurs, tels que la signature de traités de paix, avec plusieurs pays, qui protègent désormais leurs bâtiments des Corsaires, ce qui se traduit par une flotte moins nombreuse et corollairement la diminution du nombre de Rais étrangers ; ensuite les épidémies comme la peste et le choléra (1740, 1743, 1752, 1753) ; ainsi que les séismes (1716, 1717, 1755) et enfin, la récurrence des révoltes des populations autochtones contre les Turcs. Quoi qu’il en soit il est difficile de se faire une idée du nombre de captifs lorsqu’il se trouve multiplié par dix selon les différentes sources, modérément fiables.

Dans son livre Histoire du monde, J. Duché estime qu’en un peu plus de trois siècles, un million d’esclaves chrétiens a été détenu dans les bagnes d’Alger. Mais ce chiffre selon une étude de Robert Davis, professeur d’histoire à Ohio State University, ce nombre concerne les trois régence (Alger, Tunis et Tripoli).

Période1500-1580 1580-1680 1680-1800 Total

Esclaves européens capturés par les barbaresques 270 000 850 000 175 000 1 290 000

Cependant, ces chiffres sont réfutés par d’autres historiens, tels que David Earle, auteur de The Corsairs of Malta et de Barbary and The Pirate Wars, qui déclare que le professeur Davis a peut-être commis une erreur en extrapolant la période de 1580 à 1680, parce que c’est la période d’esclavage la plus intense, en estimant à 8 500 esclaves par an le renouvellement des esclaves soit 850 000 pour le siècle : « Ses chiffres semblent un peu douteux et je pense qu’il peut exagérer ». Pour sa part Le professeur Ian Blanchard de l’Université d’Édimbourg trouve pour sa part le chiffre d’un million d’esclaves comme possible.

REVOLTE DES CAPTIFS

En octobre 1662, à cause de la famine qui sévit suite à une sécheresse, la nourriture vient à manquer : les barranis  se révoltent et les captifs/otages s’allient à leur mouvement. Las de leur situation, et voyant que leur nation ne les rachète pas à causes des sommes élevées de la rançon, ces derniers décident de se rebeller pour tenter de s’échapper, mais leur tentative est un échec après avoir été trahis.

CAPTIFS CÉLÈBRES.

Parmi les captifs ayant recouvré la liberté, le plus célèbre est incontestablement Cervantès, esclave du Beylerbey Euldj Ali, puis du Pacha Hassan Veneziano (lui même ex captif) de 1574 à 1580, qui a relaté sa captivité dans « La vie à Alger » avant d’écrire le chef-d’œuvre qui l’immortalise et qui contient des scènes de la vie des bagnes algérois. Un buste de l’illustre captif a été érigé en 1894 par la colonie espagnole d’Alger dans la grotte où il se réfugie lors d’une tentative d’évasion, sur le Boulevard Cervantès, près de l’actuel Jardin d’Essai du Hamma.

Emmanuel D’Aranda, un Brugeois captif au milieu du XVIIe, dont ses « relations de la captivité » publié en espagnol sont des sources largement reprises.

SOUVERAINS ET PERSONNALITES D’ALGER

Euldj Ali (Fartas)

Ali Betchine

Mezzo Morto

Hassan Veneziano

NECROPOLE

C’est au delà de la porte Bab el Oued, à l’emplacement du cimetière des Consuls, que se situait le cimetière des captifs chrétiens. C’est un moine capucin, confesseur de Don Juan d’Autriche, qui préféra utiliser l’argent du rachat de sa liberté pour acquérir ce terrain, où il sera enterré.

Farid GHILI.

Histoire et Patrimoine d’Algérie (HPA)

Image à la une : père de l’ordre des Trinitaires négociant le rachat d’esclaves français à Alger au début du XVII ème S.

Articles similaires

Laissez un commentaire