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L’Atlas, le massif montagneux ou la divinité berbéro-grecque     

Atlas maroc

Le majestueux massif montagneux de l’Atlas s’étale sur tout le Maghreb central. Sa configuration a passionné aussi bien les Berbères que les Grecques de l’antiquité. Les deux parties partagent ainsi une part de mythologie, un pan de l’histoire.    

 

 

 

L’appellation même d’Atlas a pris la forme grecque, elle serait d’origine berbère : une dérivation du mot assalas (porter) et/ou adrar (montagne). Cette chaîne montagneuse s’étend sur 2 500 kilomètres de long, selon un axe ouest-sud-ouest à est-nord-est, du cap Ghir sur l’Atlantique au Maroc, au cap Bon en Tunisie en passant par le Nord de l’Algérie. Il forme une barrière entre la mer Méditerranée et le début du Sahara. Son point le plus culminant se trouve au Maroc : djebel Toubkal à 4167 mètres d’altitude. Puis, il y a celui des monts Aurès à 2 328 mètres au djebel Chélia en Algérie, celui de la dorsale tunisienne à 1 544 mètres au djebel Chambi en Tunisie. De par cette grandeur, ce massif montagneux a certainement alimenté l’imaginaire des autochtones, les Berbères, mais aussi celui de plusieurs conquérants comme les Grecques durant l’antiquité. Il est le lieu de naissance de légendes, de mythes et de croyances religieuses. Au-delà du territoire maghrébin, toute l’Afrique du Nord représente un véritable pont entre les deux rives de la méditerranée. Les influences culturelles et les interactions y sont inévitables.  

 

Le Titan et Zeus   

En nous référant seulement à la mythologie grecque, ce mont est présenté comme la Montagne des Dieux ¹, Zeus étant, lui, le souverain, le dieu des dieux qui règne plutôt du haut du mont Olympe (le plus haut de Grèce, invisible pour les mortels). Cet ensemble de dieux est précédé de titans, notamment le nommé Atlas ². Il est le fils de Japet, père des Hyades et des Hespérides, il gouverne un territoire, un royaume au bord de la mer, à l’ouest de la Grèce : l’Atlantide. Cette terre serait considérée, aujourd’hui encore, par la recherche scientifique comme un continent enseveli au fond de la mer Méditerranée ou dans les abysses de l’océan, non loin de Gibraltar. Ses sommets les plus hauts, ceux de la chaîne Atlas, auraient subsisté ? Épargnés par les eaux pour rester comme un témoin, une relique pour l’humanité ? Cet Atlantide va-t-il un jour refaire surface ? Ses habitants, les Atlantes, sont-ils si instruits et si évolués grâce à des maîtres divins qu’ils sont autant glorifiés ? Leur souverain Atlas s’est-il retrouvé contraint de quitter la surface de la terre ? D’autant qu’il connait bien les profondeurs de l’océan ? Voilà une histoire qui relève bien du mythe de la souveraineté sur la terre.  

 

Atlantes 

Au-delà de cette énigme, le père de l’histoire, le Grec Hérodote (né vers 484 av. J.-C.)  évoque un Mont Atlas dans son récit sur l’Afrique du Nord qu’il appelle Libye (Enquête, IV, 184) : « Il est étroit, et rond de tous côtés, mais si haut, qu’il est, dit-on, impossible d’en voir le sommet, à cause des nuages dont il est toujours couvert l’été comme l’hiver. Les habitants du pays disent que c’est une colonne du ciel ». Dans cette région, située à l’extrême d’Afrique du Nord, il mentionne les Atlantes (nom pris de ces montagnes) et affirme même connaitre ces habitants sans évoquer le Dieu Atlas. Il est le premier auteur connu à utiliser le nom d’Océan Atlantique pour indiquer la mer qui commence au-delà des Colonnes d’Hercule (Enquête, I, 202), soit l’ancien nom des montagnes bordant le détroit de Gibraltar. Le mot même d’Atlantes est source d’inspiration chez le philosophe Platon : la Cité fictive ou le mythe de l’Atlantide. Toujours est-il que la version du récit d’Hérodote relèverait d’une légende, sinon d’une croyance chez les Berbères en un Dieu nommé Atlas. Ce dernier serait devenu, parmi tant d’autres, celui des Grecques. Car les titans sont comparables aux dieux.  

 

Hercule 

Atlas sera confronté au géant Hercule (demi-dieu) qui est appelé à accomplir douze travaux surhumains. Le onzième en terre nord-africaine. Il doit cueillir les pommes d’or du jardin des Hespérides³. Pour ce faire, il sollicite l’aide d’Atlas qui, lui, est le seul épargné en étant condamné à soulever la voûte céleste pour toute l’éternité, après la défaite des Titans dans la guerre les opposant aux dieux de l’Olympe. Il admet d’aller à la cueillette pour Hercule, ce dernier ayant déjà tué Ladon le gardien des Hespérides. Il est, surtout, bien heureux de se libérer de son fardeau, ne serait-ce qu’un instant. A son retour, il refuse de le reprendre. Le rusé Hercule prétend réajuster le poids sur ses épaules, il laisse « la charge du monde » à Atlas, récupère le butin et s’en va. Cette dualité suscite l’interrogation sur le rôle de l’être divin, la place de chacun d’eux. Atlas soutient plutôt le ciel, non pas la terre. Hercule est mis à l’épreuve pour assurer la protection des humains. Et à chacun d’eux sa propre puissance, sa sagesse. La dimension tragique dans la Grèce antique est telle qu’elle renvoie aussi à la problématique de l’équilibre de l’univers, à l’image que se fait l’esprit grec sur les cieux pour protéger les mortels. Qu’en est-il donc de l’image d’un Atlas ? Serait-il autant vénéré pour être comparé au mont immortel et mériter de porter son nom ? Ou bien, est-ce plutôt l’inverse ? Cela revient aussi au débat incessant des scientifiques de l’ère contemporaine sur la question : Qui porte les cieux, qui porte le monde ?  

  

Mohamed Redouane 

 

  1. Voir livres Le choix AtlanteLa montagne des Dieux de Guillaume Delaage. Editions Alexandre Maryason. / guillaume-delaage.com  
  2. Japet est l’un des quatre Titans qui conspirent avec Cronos contre leur père Ouranos. Lui et ses frères se placent aux quatre coins du Cosmos et dès que le Ciel descend rejoindre la Terre, rapidement, le maintiennent pendant que Cronos le châtre avec une faucille.  Japet a eu quatre fils, dont l’aîné Atlas, selon le Grec Hésiode d’Ascra, poète et théologien, qui s’est joint avec Ménoetios à Cronos et aux Titans dans la guerre contre Zeus et les dieux de l’Olympe. 
  3. Jardin des Hespérides : Dans la mythologie grecque, selon Hésiode d’Ascra, des vierges aux voix claires gardent le jardin où poussent les pommes d’or, présent de la Terre à Héra lors de son mariage avec Zeus. Elles sont les filles d’Erèbe et de la Nuit. Aeglé, Erythie et Hespéria vivent au loin, à l’ouest, ou au pied du mont Atlas, ou ailleurs encore, parmi les Hyperboréens. Elles veillent sur le verger des dieux avec l’aide d’un dragon, Ladon. Lorsque les pommes d’or, prises par Hercule, sont parvenues à la déesse Athéna, cette dernière les a reportées dans le jardin des Hespérides qu’elles ne doivent pas quitter.

  

Bibliographie:

  1. Platon et ses dialoguespersonnagesAtlas héros mythologique (plato-dialogues.org).  
  2. Histoire d’Hérodote. Livre IVMelpomène (Edition Charpentier, Paris 1850). 
  3. Qui porte le Monde ChristopheAtlasHercule et Marie (15701650)‪ par Olivier Christin dans Revue de l’histoire des religions.
  4. Dictionnaire de l’Encyclopédie Universalis.  
  5. Illustration: https://www.justgiving.com/fundraising/ceri-stewartatlastrek

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