A l’ouest du pays, la h’rira est la reine de la table du ramadan. Plus que la chorba, elle se décline en une multitude de variétés. La h’rira n’est pas exclusivement marocaine, elle connait un grand succès dans nos villes de l’ouest et même du centre, comme Blida et Cherchell. Sa particularité est le levain. Traditionnellement, ce dernier se prépare plusieurs jours à l’avance, avec de la farine, de la levure de bière et du jus de citron, qu’on laisse lever. Mais on peut aussi le faire sur place en délayant de la farine dans l’eau avec du jus de citron.
Le levain est nommé « la taduira » parce qu’il faut touiller sans arrêt pour le délayer et éviter les grumeaux. Pour ce qui est des ingrédients de la h’rira, ils sont multiples et changeants à souhait et chaque famille a sa recette. La base reste la même, c’est-à-dire beaucoup de tomate fraîche égrainée et mixée. Certaines cuisinières la préparent avec des herbes fraîches et des épices, alors que d’autres y ajoutent des légumes (carottes, pommes de terre et navets) qui seront mixés en fin e cuisson. D’autres encore y ajoutent des légumes secs, des lentilles en particulier. La h’rira se fait avec ou sans viande, mais généralement avec des pois chiche. Et plus que les légumes ou les herbes, ce sont les épices qui vont la relever et lui donner un goût subtil. Safran, carvi, ras el hanoute (mélange d’épices), cannelle, gingembre… Chaque recette a sa saveur. En fin de cuisson, avant de mettre le levain, on jette une bonne poignée de pois chiche, généralement sans leur peau, ainsi que des pâtes : du riz, ou du vermicelle seul ou associé aux petits plombs. Une fois cuits, on fait la taduira et on ajoute un œuf battu lorsque c’est une recette de h’rira sans viande. Pour certaines recettes, tout doit être mixé, y compris la viande et les pois chiche (l’une des h’rira oranaise par exemple). Mais généralement, on mixe les légumes et/ou les herbes seulement.
D’un point de vue nutritionnel, la h’rira est à elle seule un plat complet ! De plus, nous savons désormais que la tomate cuite contient beaucoup plus de lycopène, un antioxydant puissant. De même, la cannelle, le gingembre et le carvi sont très recommandés pour leurs bénéfices sur la santé. Une fois de plus, ça confirme que nos ancêtres – d’instinct ou non- savaient y faire ! Pour ce qui est de l’étymologie de la h’rira, selon des articles trouvés ici et là sur le web, elle doit tirer son nom de son mode de préparation : le «mélange» des ingrédients, le «délaiement» du levain ou de la farine, l’obtention d’un potage «velouté, onctueux».
Aussi, son effet sur l’estomac- du jeûneur en particulier- serait semblable à celui de la soie sur la peau. Mais son histoire reste un peu floue. On lui reconnait volontiers des origines andalouses. Le mot h’rira aurait été retrouvé dans des textes anciens arabes de l’époque andalouse. Cette soupe serait donc d’origine morisque et d’adoption tlemcienne, rentrée par Oujda (Maroc) et répondue dans tout le Maroc. Selon une autre version, la h’rira serait carrément d’origine marocaine et se serait répondue dans l’ouest algérien.
Quelque soit le chemin qu’elle a emprunté, la h’rira est la soupe du ramadan, par excellence, pour de nombreuses familles de l’ouest. Et durant ce mois de jeûne, en plus de son effet réhydratant, elle est sans conteste un très bon choix nutritionnel, de part sa teneur en tomate et en épices. La h’rira, la magie des épices
K.T