Né à Alger le 13 janvier 1923, Ali Ali-Khodja est l’un des plus anciens artistes algériens. Il fut le doyen des plasticiens jusqu’en 2010, année où il décède à l’âge de 87 ans.
Issu d’une famille ottomane très ancienne, Ali Ali-Khodja a grandi entouré de deux grands artistes, ses oncles Omar et Mohamed Racim qui, après la mort de son père en 1927, le recueillent alors qu’il a à peine 4 ans.
C’est auprès de ses mêmes oncles qu’il apprendra la calligraphie et l’enluminure. Il à 10 ans et il s’avère déjà très doué. Pourtant, ses rêves dépassent ce qu’il apprend. Ses envies vont vers l’inédit, le différent aussi. Et Mohamed Racim ne peut que le comprendre. Des années plus tard, Ali Ali-Khodja raconte : «Je ne comprends pas qu’on puisse peindre sans se remettre en question, sans agir contre les idées préconçues, l’immobilisme… Il y a une évolution de la vie. D’ailleurs, mon oncle Mohamed me disait : »Si j’avais été de ta génération, j’aurais fais autre chose ». Il était très ouvert. Il achetait chaque semaine Sciences & Vie que je lisais après lui avec avidité. Comme j’étais asthmatique et qu’il n’y avait pas de pénicilline à l’époque, j’étais souvent obligé de rester à la maison, et là j’en profitais pour plonger dans l’Encyclopédie qui m’ouvrait de nouveaux horizons. Au fond, aussi bien Mohamed que Omar étaient partagés entre les contraintes de l’art appliqué et leur désir de libérer leur expression. Mohamed plus que son frère, sans doute parce qu’il avait voyagé et séjourné à Paris. Il m’a beaucoup aidé à m’épanouir et à m’en sortir.»
C’est ainsi qu’il entame son cheminement personnel, s’appuyant sur trois points : «le questionnement, le dépassement, la transcendance». Il transforme peu à peu la miniature, en touchant à la lumière, au cadre. Puis peint sur la toile. Du figuratif au début, du semi-figuratif ensuite et passe enfin à l’abstrait.
Il a à peine 18 ans lorsqu’il commence à exposer dans des salons. Mais il avouera plus tard qu’il ne produisait pas beaucoup. Car à l’époque, il doit gagner sa vie par un travail. Sa première exposition personnelle a lieu en 1946. Durant ces années, il reçoit deux bourses de la Ville d’Alger en section miniature.
Il participe à d’autres expositions collectives qui le mènent dans plusieurs villes du nord de l’Europe.
En 1948, il est nommé au Musée des arts et traditions populaires où il travaillera jusqu’en 1961, année où il est recruté à l’Ecole des Beaux-arts d’Alger comme professeur de décoration. Il y restera jusqu’en 1994.
Après l’Indépendance, il dessine le premier timbre poste commémoratif algérien, lors de la célébration du premier anniversaire de l’indépendance. Il en signera 26 autres, autour de différents thèmes. Par ailleurs, il est également le dessinateur des armoiries de la ville d’Alger (1965).
Côté peinture, il touche à l’aquarelle, la gravure. Il abandonne le figuratif pour revenir un peu à la miniature et à l’abstrait, et continue à participer à des expositions collectives.
En 1990, il présente une exposition individuelle à la galerie Isma de Riadh El Feth. Tahar Djaout lui consacre un bel article dans l’hebdomadaire Algérie Actualité. « Aujourd’hui, après un demi-siècle de pratique artistique (sa première exposition date de 1941), Ali-Khodja peut enfin affronter la couleur dans un bras-le-corps jubilant : il ouvre sa toile toute grande et les couleurs affluent, submergent les contours et les formes, s’agitant pour créer la vie, pour ressusciter les premiers germes d’une sorte de magma originel », écrit le journaliste à la fin de son article. Plus haut, décrivant le peintre, il précise : « si l’on considère l’itinéraire d’Ali-Khodja, qui va avoir soixante-dix ans, on s’aperçoit que le peintre n’aime pas beaucoup les confrontations avec le public : quatre expositions personnelles et une quinzaine de participations à des expositions collectives. Nous avons affaire à un artiste exigent et discret qui n’excelle guère à brasser du vent ou à emboucher des trompettes, qui tient avant tout à son plaisir et à sa liberté, à une indépendance qui lui fera rejeter toute appartenances doctrinales ».
Depuis, Ali Ali-Khodja qui a reçu le Grand prix national de peinture (Alger, 1970), le Prix de la meilleure affiche publicitaire à l’occasion du dixième anniversaire de l’Indépendance et la Médaille du mérite national (Alger, 1987), poursuit ses expositions, individuelles et collectives, plusieurs années encore. La dernière remonte à 2009, au Centre culturel de la radio algérienne, une année avant son décès, survenu le 7 février 2010 à l’âge de 87 ans.
Synthèse Khadidja T.
Sources :
- https://www.a-ali-khodja.com/
- « Tahar Djaout, Une mémoire mise en signes, Écrits sur l’art », textes réunis par Michel-Georges Bernard, Préface de Hamid Nacer-Khodja, El Kalima Éditions, Alger, 2013
- « Ali Ali-Khodja. Hommage au grand artiste (1923-2010). Le hasard et le doute », par Ameziane Ferhani, publié le 08/02/2014 dans le supplément Arts&Lettre d’El Watan. (texte contracté, paru dans le catalogue de l’exposition d’Ali Ali-Khodja à la Citadelle d’Alger en avril 2005.)
- Achour Cheurfi : « Dictionnaire encyclopédique de l’Algérie ». Editions ANEP, 2007