Hammam El Maskhoutine (le bain des damnés), l’un des plus beaux, des plus attirants bains romains encore en activité, n’a jamais cessé de susciter moult légendes et maintes histoires.
Même si personne n’est en mesure, à nos jours, d’en situer la date exacte de sa découverte, l’on peut affirmer que ce fut durant le règne romain.
Situé à une quinzaine de kilomètres de Guelma, et à quelques encablures d’Oued Znati, le grenier à blé, le Hammam appartient à l’ancienne ville numide appelée Malacca, qui prit son importance sous le règne de Massinissa, bien avant l’arrivée des Carthaginois et des Romains. Calama est probablement une dénomination phénicienne que les Romains ont gardée.
Les historiens s’accordent à dire que la ville a connu des batailles entre rois berbères et romains, pour sa conquête. Ainsi Jugurtha aurait livré, en l’an 110 avant notre ère, une bataille aux troupes romaines, autour de l’antique Suthul, non loin de Guelma. Mais la ville connut son apogée, bien avant, sous Massinissa (250 avant notre ère). Cependant, ce sont les Romains, inventeurs des bains, qui donnèrent une autre dimension à la ville à partir des 1er et 2ème siècles de notre ère, transformant la région en véritable grenier de Rome, en raison de l’abondance et de la fertilité des terres agricoles aux alentours.
Les sources thermales mises à jour par les Romains, autour de l’oued Seybouse, qui plonge jusqu’à l’actuelle Annaba, on y décèle l’eau la plus chaude au monde, avec des propriétés thérapeutiques qu’on ne cesse de vanter.
Mais c’est l’histoire de ces bains, et surtout des « challala » (chutes) qui ont fait la réputation de Hammam El Maskhoutine.
Les légendes s’accordent toutes à raconter l’histoire d’un couple, frère et sœur, qui s’aimaient au point de décider de se marier. Faisant partie de la catégorie des notables, le frère incestueux élimina tous ceux qui s’opposaient à ce mariage contre-nature, alors que d’autres préféraient fuir les lieux. Ceux qui assistèrent aux festivités furent damnés, foudroyés et transformés en statuettes dont les formes demeurent vivaces à nos jours en aval des chutes de Hammam El Maskhoutine.
Cependant, les légendes divergent sur l’identité de ce couple incestueux. Même si beaucoup en parlent sans évoquer de noms, certains avancent des noms, comme le puissant Cheikh Gacem, chef des Béni Khélifa. Issu d’une famille de nobles, il était richissime. Cheikh Gacem avait une sœur prénommée Fatna, célèbre pour sa beauté et son habileté. On dit que Cheikh Gacem aurait repoussé tous les prétendants, avant de décider d’épouser sa sœur, au grand dam des sages de la tribu qui tentèrent de l’en dissuader.
D’autres se contentent d’avancer qu’il s’agissait d’un valeureux cavalier, puissant et redouté par sa tribu.
Tandis que d’autres évoquent un homme riche et puissant, qui avait une sœur appelée Aurida (la Rose) ; mais, la trouvant trop belle pour la marier à un autre qu’à lui, il voulut l’épouser.
Certains parlent d’une tribu puissante et redoutée. Au sein de la tribu s’illustrait un cavalier du nom de Sid-Errezq qui avait une sœur prénommée Yamenah, aussi belle qu’il était brave. De nombreux prétendants riches et puissants la courtisaient dans l’espoir de l’épouser mais son frère ne consentit jamais à la marier, éveillant les soupçons de son amour envers elle.
Quand il fut de notoriété publique que le couple allait se marier, la communauté horrifiée par l’union incestueuse se retira des célébrations. La cérémonie se déroula à l’emplacement de l’actuelle source chaude et réunit les mariés, les témoins ainsi que le cadi.
Mais aucun des récits ne situe, avec exactitude, l’époque où ce mariage incestueux eut lieu.
Ce qui est sûr, en revanche, c’est que cette appellation ne semble pas plaire à tout le monde dans la région, au point où le nom du Hammam a été changé, tantôt en Hammam Debagh, en allusion au Mont Debagh qui le surplombe, et tant autre en Hammam El Mask Oua Tine (Musk et Figue). En attendant, la légende continue de hanter les lieux.
Illustration: https://jlcharvet.over-blog.com/article-les-eaux-de-hammam-meskhoutine-ou-les-bains-des-maudits-pres-de-guelma-en-algerie-115484612.html