Thérèse Rivière, ethnologue française, qui a vécu près de deux ans auprès des Ouled Abderrahmane au cours des années 1934-36, nous décrit avec précision l’un d’entre eux, malheureusement détruit par l’armée française en 1955 au cours de la guerre de Libération, et nous explique en quoi ils constituaient un élément clé de l’organisation économique et sociale des tribus de ces régions. Nous reproduisons ci-dessous un extrait de son Essai sur les greniers collectifs des Chaouia – population semi-nomade des Aurès.
«Les greniers collectifs, plus ou moins fortifiés, toujours faciles à défendre, de l’Afrique méditerranéenne, signalés du Maroc à la Libye, ont été surtout bien étudiés au Maroc. Ces véritables coffres-forts à céréales et à fruits secs abondent dans l’Aurès, chaînon le plus important de l’Atlas présaharien algérien. Envoyée en mission dans l’Aurès de 1934 à 1936 par l’Institut international des sciences et des civilisations africaines et le Musée ethnographique du Trocadéro, j’ai entrepris l’étude complète de ces magasins, étude qui avait été ébauchée avant 1900 par Emile Masqueray. J’ai continué mes travaux en septembre 1937 et je compte les terminer cet automne. Les Chaouia de l’Aurès sont pour la plupart des semi-nomades, cultivateurs de céréales et éleveurs de chèvres et de moutons.
Ainsi, les Ouled Abderrahmane, tribu d’un millier de personnes, du versant sud de l’Ahmar Khaddou, dont j’ai étudié l’habitat dans le dernier numéro d’Africa, possèdent des terres de culture étagées sur 40 km, du nord au sud, d’une altitude de 30 à 2 000 m, c’est-à-dire des sommets enneigés du djebel Taktiout à la région alluvionnaire du Sahara. Le territoire de cette tribu a environ une quinzaine de kilomètres de large en est-ouest. Les greniers fortifiés sont également présents en Ethiopie, c’est-à-dire dans l’ancienne Abyssinie.
Thérèse Rivière (1901-1970), tout d’abord assistée par Germaine Tillon, puis travaillant seule, étudiera plus particulièrement, au cours de sa mission, les techniques d’agriculture et de tissage. Vivant en symbiose avec les habitants de la région dont elle partage la vie, elle rapportera une riche collection d’objets, de photos et de dessins exceptionnels par leur qualité et leur singularité faits par les habitants, garçons ou adultes, et actuellement archivés au Musée du Quai Branly.
Retrouvez l’article dans son intégralité dans la revue (4 – Les cités oubliées) de Babzman
Ch. Benhassine
Aasppa Athar