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Disparition du Réalisateur du film sur la guerre d’Algérie «Avoir 20 ans dans les Aurès», René Vautier à l’âge de 86 ans.

rRené Vautier, c’est l’homme à qui l’on doit la fin officielle de la censure politique au cinéma en France. Grâce à 33 jours de grève de la faim, en 1973. Il ne subira plus le harcèlement d’état (confiscation de bobines et prison pour Afrique 50, poursuite pour atteinte à la sûreté nationale avec Une nation l’Algérie en 1954, etc.), mais on continuera à taire son œuvre. Une seule fois, son film le plus connu, Avoir vingt ans dans les Aurès, prix de la critique internationale à Cannes en 1972, passa à la télé, mais «par erreur», remarquait-il avec humour.

Né à Camaret-sur-Mer (Finistère) le 15 janvier 1928, Vautier est l’auteur d’un oeuvre essentiellement anticolonialiste, qui se focalise sur la guerre d’Algérie, dénonçant en particulier la torture. Mais son tempérament engagé le pousse à filmer aussi contre le capitalisme (Quand tu disais Valéry, en 1976), contre l’apartheid Frontline, 1976, qui n’obtient pas le visa de diffusion en France) ou le FN (A propos de l’autre détail, 1984-1988) voire à propos de la pollution (Hirochirac, 1995).

En 1944, à 18 ans, il est chargé de la propagande au sein du groupe de Résistance EDF de Quimper. A peine sorti de l’Idhec, il tourne la Grande lutte des mineurs (sur les grèves de novembre 1947) et surtout Afrique 50, documentaire sur les émeutes anticoloniales en Côte-d’Ivoire et sur leur répression sanglante par l’armée française  : «René Vautier, écrit le critique Georges Sadoul en 1951, tranche par son allure et ses convictions, il pense visiblement que lorsqu’un mur se dresse sur la route de ce qu’il veut montrer, la seule solution consiste à foncer dans le mur, caméra au poing et tête en avant. Les murs n’ont qu’à bien se tenir.»

En 1955, c’est Une nation, l’Algérie, histoire de la colonisation. En 1957 et 1958, Algérie en flammes, filmé dans les maquis des Aurès-Nementchas et le long de la ligne Morice, réseau de barbelés électrifiés qui séparait l’Algérie de la Tunisie. Ce qui n’empêche pas Vautier de passer vingt-cinq mois dans une prison clandestine du gouvernement provisoire algérien, à Denden à l’ouest de Tunis, suspecté d’être un agent de Moscou.

Après l’indépendance de l’Algérie, Vautier devient directeur du centre audiovisuel d’Alger et secrétaire général des cinémas populaires (cinés-pops), organisme de cinéma ambulant dont les débats post-projections enflamment le bled. En 1972, Vautier signe Avoir 20 ans dans les Aurès, fiction tournée en Tunisie (avec Alexandre Arcady et Philippe Léotard) et fondée sur des heures d’entretiens au magnétophone avec des anciens appelés du contingent. Un film qui, aux dires du réalisateur, voulait apaiser sinon domestiquer une question obsédante : «Comment peut-on mettre des jeunes en situation de se conduire en criminels de guerre ?» René Vautier est mort dimanche matin, dans sa Bretagne natale.

 

Service culture, libération du 4 janvier 2015

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