Dans nos manuels scolaires, dans notre Histoire officielle, Émilie Busquant n’existe pas. Pourtant, elle fut la compagne de Messali Hadj, et serait même à l’origine du drapeau algérien.
Emilie Busquant est née le 3 mars 1901, à Neuves-Maisons en France. Son père est un mineur anarcho-syndicaliste de Lorraine, c’est à dire un militant ouvrier qui combat pour l’émancipation et l’égalité. Emilie suivra son chemin et ses idées.
Vendeuse au rayon « Parfumerie et objets pour dames » aux Magasins Réunis, l’un des plus anciens magasins de parfumerie à Paris, sa vie bascule en octobre 1923 : dans son petit appartement, sa voisine lui présente un ami, venu à Paris, comme elle, pour échapper à la misère et trouver un travail. Lui arrive d’Algérie. Emilie, 22 ans, a, depuis l’enfance, le goût des combats pour la justice. Avec Messali, 25 ans, ils vont ensemble se battre pour que ce qui était alors un département français devienne une nation à part entière.
Emilie participera avec Messali Hadj et des militants algériens à la création de l’Etoile Nord-africaine (ENA) à Paris en 1926, le premier mouvement nationaliste à revendiquer l’indépendance de l’Algérie alors colonie française depuis 1830.
L’Étoile Nord‑Africaine reposait sur un point fondamental : l’Assemblée constituante calquée de la révolution française de 1789. Ce mouvement rassemblait les nombreux ouvriers et manœuvres algériens, un syndicat puissant pouvant mobiliser des milliers de militants. Le gouvernement français faisait pression sur Messali Hadj pour qu’il abandonne, mais à chaque fois, Emilie refusait. Elle rédigera avec lui le Mémoire de l’Etoile destiné à la Société des Nations en janvier 1930, participera à de nombreuses manifestations en Algérie et en France et organisera la défense de Messali pour ses nombreux procès en 1934, en 1937, en 1939 ou en 1941.
En 1929, Émilie Busquant coud à Tlemcen, le premier drapeau algérien, avec le tissu blanc et vert, le croissant et l’étoile aux couleurs rouges. Les historiens divergent sur cet épisode et certains doutent qu’elle soit la mère du drapeau d’Algérie. Mohamed Benchicou qui lui a réservé un roman, « La Parfumeuse », écrit : « Ce drapeau, elle l’avait voulu aux couleurs de cette organisation nationaliste révolutionnaire à laquelle elle avait déjà pensé chez Gégène, un parti qui soit à cheval sur la Révolution française, la Commune et l’islam : le rouge des insurgés de 1789 et du sang des communards, du Maghreb aussi, le vert et le croissant de l’islam. »
Le 14 juillet 1939, Elle défile avec le PPA aux côtés de Mohamed Douar et Mohamed Khider derrière ce drapeau algérien. Emilie Busquant fut incarcérée à la prison d’El Harrach avec Messali Hadj et toute la direction du PPA pour avoir refusé de se plier au pouvoir colonial qui l’accusait de « terrorisme ».
Emilie Busquant décédera le 2 octobre 1953 à Alger, un an avant le déclenchement de la Révolution. Elle ne connaitra pas cette lutte acharnée du peuple algérien et ne vivra pas la fin de la nuit coloniale le 5 juillet 1962.
Messali Hadj dira dans ses Mémoires qu’« elle était née dans une région de France fiévreuse, révolutionnaire et patriotique à la fois et avait partagé avec les membres de sa famille le sort d’un prolétariat exploité et humilié ».
Elle fait partie de ces femmes engagées que l’Histoire a oubliées. Même dans son village lorrain, très peu de gens avaient entendu parler d’Emilie Busquant. Il a fallu attendre 2003 et la pose d’une plaque commémorant l’anniversaire de sa mort sur un des murs de sa maison natale, à Neuves-Maisons, pour savoir qui elle était. « Dans mon cœur de Française, il n’y a pas de frontière dans la lutte pour la liberté », peut-on lire sur cette pierre où l’on découvre qu’elle fut l’épouse de Messali Hadj, le fondateur du Mouvement national algérien, auprès duquel elle a lutté pour l’indépendance de l’Algérie.
Synthèse K.T.
Sources :
- https://lalanguedeboiscenestpaspourmoi.blogspot.com
- https://www.lemonde.fr
- https://quartierslibres.wordpress.com
4 commentaires
Ce sont ceux qui ont fabriqué notre « histoire officielle » qui imposent cette amnésie. A nous de dépoussiérer tout cela pour rendre hommage à ces braves personnes sans passer par la « case officielle » qui ne sert qu’à tronquer l’Histoire et à nous tromper.
pourquoi pas la pose d’une plaque commémorant son anniversaire ici en Algerie
Saadani à la tête du FLN, Sidi said a la tête de l’UGTA, Benghabrit a la tête de l’éducation et tant d’autres mafieux aux commandes du pays, comment voulez-vous? que l’histoire de l’Algérie soit traité avec équité et sincérité.
Saadani à la tête du FLN, Sidi said à la tête de l’UGTA, Benghabrit à la tête de l’éducation et tant d’autres mafieux aux commandes du pays, comment voulez-vous? que l’histoire de l’Algérie soit traitée avec équité et sincérité.