Le FLN profite de l’ouverture d’une session de l’ONU pour lancer un mot d’ordre d’une grève générale de huit jours. Un véritable coup psychologique pour la France coloniale.
Alors que la charte adoptée lors du congrès de la Soummam de 1956 a clairement défini les buts de la guerre, considérant comme prioritaire de faire gagner à la cause algérienne l’opinion internationale, le FLN décide de lancer une action de grande envergure lors de l’ouverture de la session de l’ONU. Cette dernière prévue le 6 décembre 1956, puis reportée au 20 décembre est finalement fixée au 28 janvier 1957. Le CEE décide d’organiser une grève de 8 jours coïncidant avec cette date.
L’objectif est de marquer les esprits. Démontrer au monde entier le caractère populaire de la Révolution algérienne. Montrer aussi que le peuple est totalement acquis au FLN et qu’il est prêt à se mobiliser autour de lui pour arracher l’indépendance.
Plusieurs semaines auparavant, le mot d’ordre est lancé au sein de la population et les familles doivent s’approvisionner en denrées de première nécessité, de quoi tenir une semaine.
Ben M’Hidi et le C.C.E. avaient publié plusieurs tracts annonçant l’épreuve de force : «Durant les journées de grève ne circulez pas dans la ville européenne. Ne sortez pas de la Casbah. Evitez tous les rassemblements en des lieux clos, ils pourraient faciliter des rafles éventuelles. Hébergez dans vos propres maisons les pauvres, les mendiants, les frères sans logis. Faites des provisions de vivres et d’eau pour huit jours. Secourez les frères les plus pauvres qui n’auront pu épargner. »
Le jour J, le pays tout entier est mobilisé. Les quartiers musulmans sont déserts.
Les P.C. des régiments paras et l’état-major informés à l’avance de cette action, lancent une vaste opération antigrève à la première heure, notamment dans la Casbah d’Alger, avec un seul but : faire sortir les musulmans, faire ouvrir les boutiques. Par la force et maison par maison.
Des officiers d’action psychologique trient les hommes. Dans la rue Randon, l’artère la plus large de la basse Casbah, des files de camions attendent près des portes de sortie. Les hommes sont poussés sans ménagement hors de la ville et les plus récalcitrants sont embarqués pour interrogatoire.
En France, des milliers d’algériens observent également la grève, sous le contrôle de la Fédération de France. Selon des témoins : «Plus de 300 000 OP (ouvriers spécialisés) ont observé la grève pendant 8 jours. Ce qui a considérablement ralenti le tissu industriel français», rappelle Ghafir Mohamed, dit Moh Clichy, cadre fédéral de la FF.
Dans les maquis, les moudjahidine du FLN doivent se partager à deux une boite de sardine, par jour, voire pour deux jours, durant cette semaine de grève, selon plusieurs témoignages.
Pour le gouvernement français, cette action et son résultat est une véritable gifle. Ainsi, le peuple algérien s’est bel et bien rangé derrière le FLN. Ce dernier gagne aussi un point : l’action qu’il a lancée est médiatisée dans le monde entier. Désormais nul ne peut douter que le peuple algérien veut, exige, revendique et souhaite obtenir son indépendance.
Pourtant, le chemin vers la liberté est encore long et semé d’embuches. Le cessez-le-feu n’interviendra que dans cinq longues années durant lesquelles d’autres actions devront être menées pour crier haut et fort le rêve d’un peuple en souffrance…
Zineb Merzouk
Sources :
- « C’était l’une des actions politiques grandioses du FLN des maquis. La grève des 8 jours vue d’Alger et de France », par Abachi L. Publié dans Le Soir d’Algérie du 27-01-2013
- « La grève du FLN en janvier 1957 », dans https://www.histoire-en-questions.fr
- « La grève des 8 jours (28 janvier – 4 février 1957) évoquée au Forum de la Mémoire : Une victoire politique », par Nora Chergui. Publié dan El Moudjahid du 29-01-2014.
- « Grève des huit jours de 1957 : Le rôle déterminant de la fédération de France du FLN », par Djamel O. Publié dans Horizons le 26 – 01 – 2010.