En berbère aberkukès veut dire «faux couscous», c’est dire comme il en est proche tant dans sa texture que dans sa préparation et ses recettes. Berkoukès, aïch ou abazine, ces grosses graines roulées à la main comme le couscous, est un plat berbère très ancien.
Auparavant, il était roulé en été et devait sécher plusieurs jours avant d’être caché pour la âawla (une sorte de réserve) pour les froides journées d’hiver. Aujourd’hui, on peut l’acheter tout prêt, qu’il soit roulé d’une manière artisanale ou industrielle. Malgré cela, certaines familles demeurent attachées aux us et préfèrent le préparer à la maison et le conserver comme avant.
Mais si dans la majorité des régions, le berkoukès se cuisine exclusivement en hiver, à l’Ouest, il est souvent préparé pour la femme qui vient de mettre un bébé au monde, elle le consomme durant sept jours pour reprendre des forces. On retrouve également cette habitude dans certaines villes du nord, notamment celle de Cherchell.
A Tlemcen, entre autres régions, il se prépare aussi pour le Mouloud et pour Yénayer (jour de l’an berbère). Pour cette dernière fête, il a la même symbolique que le couscous, c’est-à-dire que ses graines augurent d’une année de bonne récolte.
Mais quelle que soit l’occasion ou la saison, ce plat riche et nourrissant, compte autant de variantes que le couscous. Il est même fort à parier qu’il y a autant de recettes de berkoukès que de familles qui le préparent, comme son cousin le couscous. Ainsi, s’il faut faire un tour d’horizon et expliquer les différentes «formules» de ce plat traditionnel, il faudrait faire le tour de l’Algérie, ville par ville, maison par maison.
L’on se contentera, cependant, de donner un petit panel, laissant aux auteurs de livres de recettes de relater en détail les ingrédients qui composent chaque recette selon son origine. En revanche, nous pouvons dire en résumé et dans l’ensemble comment il se prépare.
Il peut être garnit de légumes de saison comme le couscous, ou de légumes secs tels que les fèves, les pois chiche et les haricots cornilles (loubiet el messelmine, celle avec le «nombril» noir). Parfois, on le retrouve avec un mélange des deux, ce qui le rend encore plus riche et plus nourrissant.
A Cherchell, il se prépare aussi avec la panse du mouton (douara ghonmi) qu’on offre à la mariée, la veille de la grande fête. Dans cette même ville, il se cuisine aussi pour les tablées quotidiennes ; sec, et parfumé de graisse séchée (khliî).
Le berkoukès a cette particularité d’être une base qui s’accommode avec différentes combinaisons, selon les aliments disponibles, selon la saison et ses légumes aussi, et qui, comme le couscous, peut aussi bien être un mets de grandes occasions ou un plat, dit de pauvres. Et c’est certainement pour ces raisons, et d’autres, qu’il fait partie des plats les plus anciens de la Berbérie. C’est aussi ce qui fait de ces grosses graines magiques un délicieux repas, d’autant qu’elles se multiplient à la cuisson, «tezka» ; comme on dit chez nous.
Zineb Merzouk.