Après deux batailles décisives à Carthage, en 533, l’armée romaine, conduite par le général byzantin Bélisaire, met fin au pouvoir des Vandales en Afrique du nord.
Déjà, nommé général en chef des troupes d’Orient, en 530, Bélisaire jouit d’une grande crédibilité auprès de l’empereur romain d’Orient, Justinien Ier en raison de son dévouement et de son expérience d’officier tacticien. La première campagne extérieure visée par Justinien est celle d’Afrique du nord, là où la souveraineté vandale persécute les chrétiens, y compris les Romains résidents en les obligeant à se convertir à l’arianisme, la doctrine condamnée par l’église pour hérésie. Voilà un motif fondamental. D’autant que le roi vandale Gélimer a pris le trône de son cousin Hilderic qui, lui, a plutôt adopté le catholicisme et entretient de bonnes relations avec Justinien. Ce dernier hésite pourtant à partir en guerre. Une telle entreprise serait complexe, voire impossible. Il appréhende un éventuel affrontement avec la flotte vandale, mais aussi les conséquences du climat durant une longue navigation, des dépenses onéreuses. Après moult consultations, la bénédiction d’un évêque l’a résolu : « Dieu m’est apparu, il vous ordonne par ma voix de vous armer pour la défense des catholiques. Je vous annonce en son nom la victoire, il ajoutera l’Afrique à vos vastes Etats ».
Cap sur Carthage
Et le voilà Bélisaire, le 22 juin 533 à Constantinople, à la tête de cinq mille cavaliers, dix mille fantassins, cinq cents navires montés par vingt mille matelots, quatre-vingt-douze brigantins à un seul rang de rames, mais fermés et couverts pour protéger les soldats des traits de l’ennemi, montés par deux mille jeunes hommes choisis à Constantinople. Pour le chef de génie de cette mission, ô combien difficile !, la force ne réside pas dans le nombre de ses troupes, mais dans la stratégie militaire. Dans ce sens, Justinien s’accordera avec le gouverneur Goddas de la Sardaigne sur une révolte contre Gélimer, ce dernier ayant dépêché une grande partie de sa flotte sous le commandement de son frère Tzazon pour la reconquête de ce pays. Aussi, Bélisaire compte sur l’adhésion des populations africaines à son projet de destitution des Vandales et sur la résistance locale. Cela vaut autant qu’une victoire militaire, à condition qu’une véritable discipline soit instaurée.
Durant sa route vers Carthage, il dira à ses hommes avides de gains : « Ces espérances, vous les détruisez vous-mêmes par votre indiscipline. Arrêtez-vous donc sur cette pente funeste ; ne cherchez point dans le pillage un gain périlleux et criminel qui causerait votre perte ; craignez de vous ravir à vous-mêmes l’amitié et la confiance de ces peuples qui nous ont appelés comme leurs libérateurs, et que nous forcerions bientôt à nous traiter en ennemis ». En fin août, il débarque à la presqu’île Caput Vada (Ras Kaboudia en Tunisie), il remonte vers le nord sans aucun obstacle devant lui jusqu’aux faubourgs de Carthage.
Ad Decimum et Tricamarum
Il est vrai que la tâche est ardue, car ce n’est que le 13 septembre que l’armée de Bélisaire livrera bataille. Victorieux à Ad Decimum (sud de Carthage), il aura opté pour ce lieu, un passage étroit dans les montagnes de l’Atlas, pour bien exécuter son plan. Les commandants Ammatas et Gibamond, respectivement frère et neveu de Gélimer, y trouvent la mort et leurs troupes défaites. Dès lors, l’armée de l’empereur Justinien Ier bénéficie d’une supériorité numérique et d’un ascendant psychologique. Bélisaire lance alors une nouvelle attaque contre le corps d’armée en désordre, commandé directement par Gélimer qui fuit vers la Numidie. Puis, il retourne le lendemain à Carthage où il est bien accueilli avec son armée. Il se consacre à fortifier les défenses de la Cité, appréhendant un assaut de Gélimer qui pourrait rassembler de nouvelles forces.
Le roi vandale attend le retour de l’effectif envoyé en Sardaigne, non sans espérer le soutien des Berbères de Numidie et des mercenaires huns qui résident à Carthage. De son côté, Bélisaire reçoit des renforts de Constantinople. Trois mois se sont alors écoulés. Au lieu de se cantonner dans la Cité, il va livrer une seconde bataille, celle de Tricamarum (à une trentaine de kilomètres de Carthage), dès le 15 décembre. Il va non seulement épargner la capitale carthaginoise des méfaits de la guerre, mais il s’imposera, une fois de plus, en fin stratège. Durant les affrontements, le commandant Tzazon, revenu de Sardaigne, trouve la mort, ce qui oblige Gélimer à ordonner la retraite. Durant sa fuite vers l’Ibérie (Espagne), il sera arrêté par les Romains en mars 534. La chute de la puissance vandale en Afrique du nord est ainsi confirmée.
Mohamed Redouane
Bibliographie :
- Vandale durant 100 ans/Expédition de Bélisaire dans algerie-ancienne.com
- La conquête de l’Afrique par les Vandales dans miltiade.pagesperso-orange
- Le siècle de Justinien : Byzance au VIe siècle dans miltiade.pagesperso-orange
- Illustration : Bélisaire par Baron François Gérard, 1797