Ath Abbas, le royaume du savoir 

Située à 1364 m d’altitude sur la chaîne montagneuse des Bibans, dans le plateau de l’actuelle localité Ighil Ali, à une centaine de kilomètres de Béjaïa, au Nord de Bordj Bou Arreridj, la Citadelle des Ath Abbès est la capitale d’un royaume dont l’influence s’étend de la vallée de la Soummam au Sahara, dès le début du 16e  siècle.  

 

Motivée par la résistance à la colonisation espagnole, dès 1510, à Béjaïa, la fondation d’El Kalaâ relève d’abord d’un refuge avant de devenir, ensuite, une forteresse et un pôle urbain. Elle est avant tout une ancienne place fortifiée de l’époque hammadite ((1065-1152), assurant le contrôle des « Portes de fer », lieu de passage stratégique dans la région. Elle constitue aussi une étape de la route commerciale, la dite triq sultan, allant des Hauts Plateaux à Béjaïa. Le pionnier Sidi Abderahmane (émir d’appartenance hafside, décédé en 1500) la pourvoit d’un statut, en fédérant les villages autour de lui. Il sera relayé par son fils Ahmed (mort en 1510) qui mènera une action de structuration. Il sera alors le premier sultan de ce royaume indépendant. La rivalité avec Tunis, capitale des Hafsides (1230-1510), est déjà installée. Et c’est sous le règne de son fils Abdelaziz Amokrane qu’elle entre dans l’histoire. La Kalaâ (citadelle) des Ath Abbès et des Ath Mokrane sera dotée de fabriques d’armes avec l’aide d’exilés musulmans, catholiques et juifs qui ont fui l’inquisition espagnole. L’essor de la ville est assuré, elle compte alors une population de 70 000 à 80 000 habitants.  

 

Centre d’enseignement 

Elle se développe autour d’un palais, d’un quartier andalou, d’un quartier juif avec synagogue et d’une mosquée. Le plus important n’est pas tant dans son rôle militaire et politique, ses rapports conflictuels avec la Régence d’Alger, son antagonisme avec le roi Koukou en Kabylie, son caractère guerrier et sa résistance à l’occupation coloniale française. Il l’est aussi dans le savoir faire industriel des Ath Abbas en matière de vêtements (étoffes de laine, burnous blanc rayé…), d’orfèvrerie (bijoux d’or d’argent) et d’armurerie (fusil, batterie, canon…) notamment. Egalement la transformation des métaux, dont le fer, qui servent à l’activité agricole ; l’exploitation du bois pour faire des meubles et des objets de menuiserie ; la fabrication du savon et d’autres activités comme la sellerie, la vannerie et la poterie. Cette  société se distingue aussi par sa culture. La Kalaâ est progressivement devenue un carrefour du mouvement intellectuel dans les Bibans, un centre d’enseignement, grâce notamment à l’apport d’institutions scientifiques de la région, celles de la vallée de la Soummam et d’un réseau de zaouïas. Cheikh Mohamed El Hadj El Mokrani s’est lui-même appuyé sur la confrérie Rahmaniya (fondée en 1774) pour entreprendre son insurrection armée contre la colonisation. Son échec, en mai 1871, sonnera aussi la chute du royaume des Ath Abbas.  

Mohamed Redouane 

 

Sources 

Gehimab (Groupe d’études sur l’histoire des Mathématiques à Bougie médiévale).  

La Kalaâ des Beni Abbès en Algérieun royaume au cœur de la Kabylie (Béjaïa) de Boumoula Nabil, enseignant chercheur. 

 Image: © DJAmine-zop

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