Le 13 mai 1958 débute une campagne d’occidentalisation (c’est le terme employé par les médias de cette époque) et visant la femme algérienne. Le pouvoir colonial aidé par la population européenne veut, par la contrainte et la force, obliger les femmes algériennes à se débarrasser du haïk, voile traditionnel, symbole de l’identité et de l’histoire du pays, porté depuis des lustres par la gente féminine algérienne.
S’en suit des actes de menaces, de renvoi des femmes musulmanes de leur travail ou des actes délibérés d’arrachage de voile sur la voie publique par la population européenne.
Sous les cris de joie et du slogan «vive l’Algérie française» martelé à l’envie par les Européens. On assiste à des scènes de prosélytisme barbare où des femmes musulmanes sont exhibées sur des podiums improvisés pour les dévêtir de leur voile et le bruler ainsi sur la voie publique.
Le haïk est bien plus qu’un symbole culturel bien encré dans la société algérienne, c’est également une arme efficace contre l’occupant. Pendant la guerre d’Algérie et notamment lors de la bataille d’Alger, cet accoutrement a permis aux femmes de transporter au péril de leur vie des armes et des bombes destinées aux combattants algériens afin de mener des actions armées contre les forces de l’occupant. Ce vêtement a donc été un moyen d’émancipation et de combat pour les femmes algériennes et qui leur a permit de s’engager pleinement dans le processus de libération du pays.
Frantz Fanon, psychiatre en 1953 à l’hôpital psychiatrique de Joinville (Blida) est né le 20 juillet 1925 à Fort-de-France en Martinique. Héros de la lutte antinazie en 1943 et figure de proue du combat contre le colonialisme et pleinement engagé pour l’indépendance de l’Algérie évoque dans son livre « Sociologie d’une révolution » le fait que le haïk de la femme algérienne était un des enjeux de la guerre libération. «Convertir la femme, la gagner aux valeurs étrangères, l’arracher à son statut, c’est à la fois conquérir un pouvoir réel sur l’homme et posséder les moyens pratiques, efficaces, de déstructurer la culture algérienne…Chaque voile qui tombe, chaque corps qui se libère de l’étreinte traditionnelle du haïk, chaque visage qui s’offre au regard hardi et impatient de l’occupant, exprime en négatif que l’Algérie commence à se renier et accepte le viol du colonisateur».
Il est fort intéressant de faire un parallèle avec l’actualité brûlante d’aujourd’hui et le débat prégnant qui secoue actuellement la société française.[…] Le hijab, ou voile islamique, foulard musulman s’est donc imposé ces dernières années comme un symbole. Il se positionne en balise entre le dedans et le dehors, le montré et le caché, le visible et l’invisible… mais, porté par des jeunes françaises issues de l’immigration maghrébine, il devient un signifiant polysémique, qui donne à voir autant qu’il cache. Le voile met l’accent sur un conflit identitaire plus que religieux.
Il semble pertinent de mettre en exergue le caractère relativement universel de la symbolique que l’on dénote à travers le port du voile. En effet, quelles que soient les obédiences et les traditions, on retrouve sous le voile l’idée de la Vérité, de la connaissance cachée ou révélée. Le dévoilement a une valeur initiatique et révélatrice et par conséquent ne relève pas du corps législatif ou décisionnaire.
Akim Koceir
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