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Période ottomane (1515 à 1830)

Les habitants d’Alger à l’époque ottomane : les chrétiens, captifs de corsaires déchainés (1ere partie)

L’ERE DES RAZZIAS DE PART ET D’AUTRE DE LA MEDITERRANEE.

La piraterie (puis la Course et le Corso) que ce soit en mer ou sur les cotes maritimes, n’est pas née avec les frères Barberousse. Bien avant eux, des siècles auparavant, des actes de piraterie en mer et des rapts et pillages sur le littoral, sont commis aussi bien au nord qu’au sud de la mer méditerranée. C’est ainsi que des milliers d’Algériens (habitants de l’aire géographique correspondante) sont tombés également aux mains des pirates occidentaux et ont connu les affres de l’esclavage.

Il est aisé et peu risqué pour les pirates du Portugal, d’Espagne, de France, d’Angleterre, des Etats cités italiens, Slaves et de Malte… ) qui sévissent en méditerranée, de s’emparer d’habitants sans défense, afin d’alimenter les marchés aux esclaves ou les galères occidentales en faisant des incursions sur les littoral non défendu. A titre d’exemple, assidûment chaque année, l’Ordre de Malte arme une douzaine de galères pour opérer des razzias sur les côtes algériennes.

Alors que le sort des Musulmans enlevés et condamnés à la chiourme ou aux travaux forcés est à peine effleuré ou timidement décrit, les prêtres, voyageurs, chroniqueurs et captifs ont multiplié les récits sur « l’enfer de Barbarie » et les malheurs des Chrétiens retenus en « Berbèrie » notamment à Alger à partir du XVI e S. Et lorsqu’elle cite la piraterie des états chrétiens, l’historiographie européocentriste passablement tendancieuse, présente la situation avec un manichéisme délirant: « Les nobles et chevaleresques chrétiens luttant contre les affreux et méchants pirates barbaresques ».

L’AVENEMENT DES FRERES BARBEROUSSE

A partir de l’avènement des frères Barberousse, Alger prend des dispositions, pas toujours efficientes à vrai dire, pour sécuriser ses côtes, mais qui donnent surtout, une autre dimension dans sa capacité de nuisance des vaisseaux marchands chrétiens. Elle fait grâce à la Course et le Corso, des milliers de captifs durant plus de 3 siècles. En effet, depuis le début du XVIe S, jusqu’à l’entame du XIXe S, les corsaires algériens très actifs sillonnent la méditerranée occidentale faisant la chasse aux bâtiments des pays qui n’ont pas signé de traités avec la Régence.

Ceux qui n’ont pas les moyens de payer leur liberté ou de s’évader (pour quelques uns), restent captifs ad vitam aeternam. Ce sont les prises en mer qui essentiellement, alimentent les bagnes d’Alger, mais les rapts sur les cotes nord méditerranéennes, voire britanniques ou encore islandaises viennent de temps à autre compléter l’origine des captifs. La majorité d’entre eux sont des hommes, mais les femmes et les enfants ne sont méprisés. Ils appartiennent à diverses classes sociales : nobles, militaires, religieux, commerçants, matelots, charpentiers, ou encore des individus exerçant toutes sortes de métiers.

Arrivés au port, ils sont conduits au batistan, (au niveau de l’actuel emplacement des portes du métro de la place des martyrs) marché aux esclaves, où a lieu une première estimation et une première enchère. Il s’agit à ce stade, de trier et de repérer ceux qui vont réellement rapporter un bon prix lors des rédemptions. Une fois les prix fixés, on les conduit devant le souverain qui s’en octroi une part, puis c’était au tour des notables de choisir. Certains captifs sont conduits aux bagnes de la Régence pour servir sur les galères, le reste est vendu à des particuliers, le plus souvent aux Maures. Ceux dont on espère une bonne rançon ou un travail spécialisé sont particulièrement recherchés. Afin de faire baisser le prix de leur rançon, les captifs s’efforcent de dissimuler aux Ottomans leur véritable condition, ou simulent certaines maladies.

ON DISTINGUE PLUSIEURS TYPES DE CAPTIFS : CEUX DU DEY, CEUX L’ÉTAT ET, CEUX DES PARTICULIERS.

Ceux du Dey : somptueusement vêtus, donneront leurs soins à la cuisine et à la maison

Ceux de l’Etat : feront office de débardeurs, manœuvres, sur les chantiers du port, aux carrières, ou même loués comme ouvriers agricoles; Deux fois l’an, les esclaves servent à bord des galères durant 50 jours environ, après quoi, ils sont affectés à d’autres tâches. Moyennant une redevance, les plus favorisés circulent librement en ville où ils exercent de petits métiers : porteurs d’eau, écrivains (dans les bagnes), « chirurgiens », vendeurs de gâteaux, etc. Certains arrivent à tenir des tavernes et gargotes, tandis que d’autres vivent de jeux de hasard.

Ceux des particuliers : Chaque maison a en effet un ou plusieurs esclaves occupés aux taches domestiques : entretien de la maison, blanchiment des murs à la chaux, fabrication du pain, garde des enfants, etc

LES CONDITIONS DE VIE DES CAPTIFS

La grande majorité ne devait pas avoir un sort enviable. « Les exactions sont insupportables dans le bagne aux cellules basses, sombres et malsaines, infestées de vermine. Couchés dans des hamacs pendus les uns au-dessus des autres, les esclaves souffrent du froid l’hiver, de la grande chaleur l’été, de l’humidité et de la vermine en toutes saisons, maltraités par des gardiens qui ne leur donnent que de mauvais biscuits et de l’eau souvent putride » selon Diego de Haedo.

Cependant il convient de distinguer des rangs dans la captivité. A coté des cas tragiques d’autres (la fameuse exception) ont été semble t-il, satisfaits de leur sort. C’est ainsi que nous trouvons quelques cas d’anciens captifs qui, une fois libérés, reviennent pour s’installer dans la Régence, comme l’indique le témoignage de Jeanbon Saint-¬André, consul de France à Alger de 1795 à 1798.

A vrai dire les conditions de vie du captif dépendent du maître qu’il a et du travail auquel il est affecté. Ceux qui appartiennent à des particuliers, dans leur malheur, ont plus de chance et jouissent d’une relative liberté de mouvement, qui les autorise à louer leurs services ailleurs; cette mansuétude leur permet d’améliorer leur quotidien , voire, faire des économies afin de racheter eux-mêmes leur liberté. Mais tous n’ont pas cette aubaine. Certains captifs mènent une vie si misérable qu’ils sombrent dans un désespoir sans nom, qui les pousse à tenter de s’évader, en dépit du châtiment qu’ils peuvent subir.

Farid Ghili

Histoire et Patrimoine d’Algérie (HPA)

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