C’est au paléolithique (près de 30000 ans av.J-C.) que les premières traces numériques firent leur apparition. Les hommes faisaient une marque sur des supports en bois ou en os (parfois même sur leur propre corps) pour inscrire un nombre de choses (bêtes, hommes, objets…).
Avant la naissance de l’écriture en Mésopotamie (région historique du Moyen-Orient, qui correspond pour sa plus grande partie à l’Irak actuel), et il y a de cela environ 10000 ans,un système de quantification fut mis en place à travers l’usage de «Jetons d’argile dont la forme variait en fonction de l’objet qu’ils représentaient, les calculi».C’est également dans la même région (Sumer) que serait née la première numérotation écrite vers 3300 av. J-C. telles que le démontrent les premières tablettes d’argile qui nous ont révélé l’écriture.
L’histoire du zéro
Les chiffres de «un» à «neuf» ont été inventés en Inde avant notre ère. Et si le premier zéro, ou le plus vieux zéro de l’histoire, représenté par un double chevron incliné, est considéré babylonien (antérieur au 3emillénaire av. J-C.) ou encore mayas (en forme ovale), c’est encore une fois à l’Inde que nous devons l’intégration du zéro en tant que nombre à part entière.
Ainsi, la numération de position avec un zéro a été inventée au cours du Ve siècle. Dans un traité de cosmologie écrit en sanscrit en 458, le Lokavibhaga, «les parties de l’univers», on voit apparaître le mot «sunya», en référence au zéro, qui représente le vide. Sa première figuration fut un petit cercle. Il sera traduit par les Arabes en «as-sifr» avant d’être repris par les Italiens en «zéphiro», lui-même issu du latin médiéval zéphirum pour parvenir à sa forme actuelle en français : zéro.
Cette numération de position indienne fut transmise aux Arabes à travers
un présent fait au calife Al-Mansour de Bagdad par une ambassade indienne en
773 de notre ère.
Le premier travail en langue arabe présentant la
numération indienne de position fut élaboré au IXe
siècle, et porte le titre de Livre de l’addition et de la soustraction
d’après le calcul des Indiens. Il fut écrit par Muhammad Ibn
Musa Al-Khuwârizmi (mathématicien, géographe, astronome et astrologue perse),
et c’est par cet ouvrage que le système de calcul indien pénétrera l’Occident
chrétien. Présenté au début du IXe siècle, il fut traduit en
latin à partir du XIIe siècle, et sacélébrité fut telle que ce
calcul fut nommé Algorisme, d’Algorismes, latinisation du nom d’Al-Khuwârizmi.
La transmission de ce savoir du zéro et de la numération de position qu’il a
rendu possible ne se fera pas sans résistance…
De l’Inde à l’Occident chrétien
Inde → proche et Moyen-Orient → Afrique du Nord → Espagne maure →Occident chrétien
Avec la conquête musulmane du Maghreb, le savoir acquis des Indiens en
matière de numération (entre autres) se
propage dans la région conquise. Et certains Occidentaux (pour les moins
réfractaires) apprirent la nouvelle numération à l’occasion des Croisades (de
1095 à 1270)ou, le plus souvent, chez les Maures d’Espagne. A ce titre, le moine français Gerbert d’Aurillac acquit cette
méthode à leurs côtés (Xe s.)et, grâce aux chaires qu’il occupa dans
les établissements religieux d’Europe, il put introduire le nouveau système en Occident.
En 999, il fut élu pape sous le nom de Sylvestre
II, ce qui lui conféra l’autorité nécessaire pour implanter la numération
indo-arabe.
Ainsi, le système de numération de position indien a été transmis à l’Occident chrétien (de façon générale) par les Arabes d’Afrique du Nord et d’Espagne, ce sont des Arabes dits «Occidentaux». Nos chiffres actuels, nous les tenons des chiffres dits «Ghubâr (forme de graphie spécifique des Arabes occidentaux), c’est sans doute pour cela que nous disons habituellement et de façon quelque peu erronée, que nous écrivons en chiffres arabes.
Ce mouvement d’intégration dans l’Occident chrétien de ce système fut accéléré grâce à l’influence déterminante du mathématicien italien Léonard de Pise, connu également sous le nom de Fibonacci*, lequel a vécu dans l’actuelle ville de Bougie, et qui a laissé son nom à une célèbre suite.*
La résistance au zéro par l’Occident chrétien fut culturelle et nationaliste (opposition à un savoir étranger, et attachement à une certaine forme d’écriture)mais aussi politique et religieuse. Et on peut donc dire qu’il a fallu plus d’un millénaire pour que le zéro, inventé par les Indiens au Ve siècle de notre ère, s’impose dans la culture de l’Occident chrétien et ne vienne bouleverser cette culture avec l’avènement de la science.
*Fibonacci : Mathématicien italien du XIIIe siècle, il a vécu à Béjaïa où il étudie les mathématiques et, notamment, les travaux algébriques d’Al-Khawarizmi. Il développe un traité sur les calculs et la comptabilité dont les méthodes sont fortement influencées par sa vie en Afrique du Nord.
*Suite de Fibonacci : Introduite comme problème récréatif dans son fameux ouvrage Liber Abaci (Livre du calcul), la suite de Fibonacci peut être considérée comme le tout premier modèle mathématique en dynamique des populations ! En effet, elle y décrit la croissance d’une population de lapins sous des hypothèses très simplifiées à savoir : chaque couple de lapins, dès son troisième mois d’existence, engendre chaque mois un nouveau couple de lapins, et ce indéfiniment. Utilisé dans cet ouvrage, sous le nom de zéfirum (en référence au zéro), le mot sera utilisé en tant que tel jusqu’au XVe siècle en Europe.Après quelques modifications, ce mot aboutit à zéfiro, qui donnera zéro à partir de 1491.
Mira B.G.
Images :
- Bulle enveloppe et calculi, photo (C) RMN-Grand Palais/Franck Raux.
1 commentaire
svp les chiffres actuels utilisés dans le monde occidental y compris l’Afrique du nord, d’où viennent ils ?
selon certaines indiscrétion ils seraient originaire de bougie en Algérie, est ce vrai ?