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Cela s’est passé le mercredi 28 février 1962 à Oran, deux véhicules piégés explosent dans le quartier Ville Nouvelle   

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A une vingtaine de jours du cessez-le-feu en Algérie, soit durant le 23e jour du ramadhan, deux voitures piégées ont explosé simultanément vers 16 heures 45, en plein cœur du quartier des Algériens de Medina Jdida (Ville-Nouvelle, village nègre selon l’appellation de l’administration coloniale), située à proximité du centre-ville d’Oran et cerclée de barbelés.

 

L’historien algérien Saddek Benkada parle de 78 morts, sans compter les corps non-identifiables, lors de cet attentat des plus meurtriers durant la guerre d’Algérie. Le premier de ce type dans l’histoire du pays, il a fait selon les estimations officielles 80 morts et 150 blessés, affectant le quartier algérien le plus important d’Oran. Des deux véhicules, dissimulant chacun d’eux un obus 105, seule la partie avant d’une Peugeot 403 camionnette bâchée sera trouvée. Le second de marque Citroën sera difficilement identifiable, entièrement désintégré. Quelques maisons vétustes se sont écroulées, d’autres ont subi d’importants dégâts, l’effet de souffle a désagrégé des voitures garées à proximité, deux kiosques à tabac sont entièrement détruits, nombre de canalisations coupées par l’explosion ont déversé des flots d’eau. Le bruit de l’explosion se fait entendre jusqu’à l’intérieur des cellules de la prison civile, tout près du lieu du sinistre. Des prisonniers sont à cette heure-ci dans la cour, ils ont nettement aperçu une épaisse fumée noire. Autant que des habitants des alentours en hauteur comme Gambetta ou les Planteurs.

 

Acte génocidaire

Quarante-trois ans jour pour jour, après cette tragédie engendrée par l’Organisation secrète armée (OAS), le témoignage d’un survivant est publié dans la presse algérienne. Abdelkader Azzizi a alors 17 ans, ce jour là, il est boucher de profession au marché Sidi Okba de la Ville Nouvelle. Il a rapporté que le choix s’est porté sur l’esplanade de l’ex-boulevard Joseph Andrew, plus précisément à côté d’une pâtisserie où la clientèle afflue pour acheter de la zlabia. Il se dirige vers le mécanicien dont l’atelier se trouve à côté du café de l’USMO (Union sportive musulmane d’Oran, le club du quartier), afin de récupérer sa moto : « Je fus surpris par une forte explosion qui m’a projeté sur plusieurs mètres ». Ayant perdu connaissance, il sera secouru et réanimé par des citoyens. Il se relèvera et prête main forte même aux secouristes. Il n’empêche que, quelques jours plus tard, il sera transféré en urgence à l’hôpital de Tlemcen, suivi six mois durant par le docteur Baba Ahmed. Les traumatismes d’un tel attentat sont si graves que le lendemain, jeudi 1er mars, la population algérienne s’est préparée dans tous les quartiers à majorité musulmane à de grandes manifestations.

 

Séparation de deux communautés

En vain, les militants du Front de libération nationale dissuadent d’aller vers la place des Victoires au sein de la communauté européenne, appréhendant d’autres coups de l’OAS mais promettant vengeance dans les jours suivants. En cette fin de guerre d’Algérie, l’OAS pratique une politique d’extermination individuelle et collective sous toutes les formes. Son crime génocidaire du 28 février a dépassé un seuil insoutenable. Il servira principalement à aggraver la haine, séparant irréparablement les deux communautés. Ancrée dans la mémoire collective des Oranais, cette date ne sera pas pour autant retenue par l’histoire et par tous les Algériens. Il aura fallu attendre jusqu’au 28 février 1992, la première fois que la société civile la commémore. La stèle installée est dotée d’une plaque sur laquelle sont gravés les noms de 27 victimes identifiées, dont un seul enfant de 10 ans et neuf mentions « inconnu ». Si le devoir de mémoire est ainsi exercé, le travail de recherche historique sur ce drame n’est pas clos.

 

 

Mohamed Redouane 

 

Bibliographie: 

  1. Le retour à l’événement : la réinscription mémorielle de la journée du 28 février 1962 à Oran par Saddek Benkada, colloque de l’université de Skikda, 2008. Dans Histoire coloniale et postcoloniale.
  2. Oran 1962 par Fouad Soufi dans Histoire coloniale et postcoloniale.
  3. Presse d’Algérie. 
  4. Illustrations 1: https://sudhorizons.dz/fr/la-destination-algerie/histoire/13338-il-y-a-55-ans-oran-etait-secoue-par-un-double-attentat-a-la-voiture-piegee
  5. Illustration 2: https://www.micheldandelot1.com/s-il-existe-en-france-trois-lieux-de-memoire-en-hommage-aux-victimes-d-a135321954

 

  

 

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