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Cela s’est passé un 13 octobre 1837, la chute de Constantine

Dans une lettre du 13 octobre 1837, adressée aux Ministres de la guerre et des affaires étrangères, le général Valée écrit : « Le drapeau tricolore flotte sur Constantine ; l’armée est arrivée devant ses murs le 6 ; la brèche a été ouverte le 11, praticable le 12, et on a donné l’assaut ce matin avec la plus grande bravoure et un succès complet… »

                             

Alors qu’une première tentative des troupes du général Clauzel se solda par un échec retentissant, en 1836, le roi français Charles X, cherchant à offrir au pays un peu de gloire militaire et une revanche, l’ordre est donné pour une seconde expédition sur la ville des rochers.

Ainsi, le 1er octobre 1837, l’armée française sort du camp de Merdjez-Hammar pour marcher sur Constantine avec environ 7 000 hommes.

Après six jours de marche, l’armée arrive aux portes de Constantine. Le 10 octobre, toutes les pièces d’artillerie sont placées sur la colline, et le 11 les forces françaises commencent à lancer leurs boulets contre les murs de la ville.

Le soir même, le commandant en chef, Comte de Damrément, envoie un message aux habitants de Constantine : « Mes canons sont au pied de vos murs ; ils vont être renversés, et mes troupes entreront dans votre ville. Si vous voulez éviter de grands malheurs, soumettez-vous pendant qu’il en est temps encore. Je vous garantis par serment que vos femmes, vos enfants et vos biens seront respectés, et que vous pourrez continuer à vivre paisiblement dans vos maisons. Envoyez des gens de bien pour me parler et pour convenir de toutes choses, avant que j’entre dans la ville ; je leur donnerai mon cachet, et ce que j’ai promis, je le tiendrai avec exactitude ».

Ces promesses ne seront plus respectées que celles faites aux gens d’Alger, au début de l’occupation, sept ans plus tôt.

Suite à ce message, le bey de Constantine, envoie une réponse pour tenter de signer un accord de paix, mais pour les français, la condition est que les portes leur soient ouvertes. S’ils ont à les forcer, aucune paix ne peut être signée. Les dès sont jetés.

Le 12, la brèche est élargie. Les contingents de musulmans stationnés à l’extérieur de la ville et qui tentent plusieurs attaques considèrent la partie comme perdue. On les voit, en effet, cavaliers et fantassins, lever successivement leur camp et reprendre le chemin de la montagne.

Et le soir même, « à six heures du soir, le général fit connaître à l’armée que l’assaut serait donné le lendemain matin, et cette nouvelle fut accueillie par des acclamations générales. Chacun y vit, non seulement la revanche de l’échec de 1836, le couronnement des efforts et de l’abnégation déployés, mais aussi la fin de souffrances intolérables ; car on manquait de tout devant Constantine. Bien que la pluie eût cessé, la situation de ces malheureux, couchant depuis tant de jours dans la boue, portant les vêtements qu’ils avaient pris à Medjez-Ammar, à peine nourris d’aliments détestables, était des plus tristes. Les chevaux, auxquels nulle ration n’avait été donnée depuis trois jours, tombaient d’épuisement ou se jetaient sur tout ce qu’ils pouvaient atteindre. Enfin les munitions d’artillerie étaient presque épuisées Qu’aurait été une retraite dans ces conditions ? Il fallait, à tout prix, prendre la ville qu’on savait remplie de vivres. » (Ernest Mercier)

Le 13 au matin, trois colonnes fortes d’un millier d’hommes donnent l’assaut. La première colonne d’attaque française fut formée par un bataillon de Zouaves, deux compagnies du 2 léger, la compagnie franche et une partie du génie sous le commandement du colonel léger et du 47 de ligne, des tirailleurs d’Afrique et de la légion étrangère. Le colonel Combe, qui la commandait, arriva devant la brèche au moment où les Zouaves demandaient des échelles. » (Ernest Mercier)

Au moment de l’assaut, la ville compte 6000 défenseurs. Mais ils ne résistent pas longtemps, ils sont forcés battre en retraite pour assurer leur retraite vers la Casbah et une issue en dehors de la ville.

Pour occuper Constantine, l’ennemi doit prendre rue par rue, maison par maison. On se bat au corps à corps, au sabre, à la baïonnette, au couteau. Les cadavres jonchent les rues

Pendant l’assaut, écrit Galibert, « une partie de la population avait tenté de fuir par les côtés de la ville non exposés à nos coups ; mais un grand nombre de ces malheureux se brisèrent sur les rochers escarpés qui ceignent Constantine, et d’où ils ne pouvaient descendre qu’au moyen de longues cordes que leur poids faisait rompre. Nos soldats furent saisis d’horreur lorsque plongeant leurs regards dans le fond de ces abîmes, ils virent cette multitude d’hommes, de femmes et d’enfants écrasés, mutilés, entassés les uns sur les autres, et se débattant encore dans les angoisses d’une douloureuse agonie. »

« On enfonce la porte, on se précipite dans les cours, dans les escaliers, sur les terrasses, dans les chambres… Quelle scène, frère, quel carnage, le sang faisait nappe sur les marches… Pas un cri de plainte n’échappait aux mourants ; on donnait la mort ou on la recevait avec cette rage du désespoir qui serre les dents et renvoie les cris au fond de l’âme… Les Turcs cherchaient peu à se sauver, et ceux qui se retiraient profitaient de tous les accidents de murs pour faire feu sur nous… J’ai vu là bien des morts, j’ai fixé bien de ces terribles et poétiques figures de mourants qui me rappelaient le beau tableau de la bataille d’Austerlitz. » (Saint Arnaud)

Vers Neuf heures, le drapeau français est hissé sur le rocher, remplaçant le drapeau rouge.

Alors que le Bey Ahmed s’enfuit pour se réfugier dans les tribus du Sud, l’ennemi pille la ville durant trois jours.

« A la Casbah, un autre spectacle m’attendait… Les détachements armés des différentes colonnes commençaient à y arriver… Mais le pillage aussi avait commencé et expliquait comment si peu de soldats se trouvaient à la Casbah. Le général Rulhières y arriva vers midi ; il criait beaucoup après les pillards, menaçait de prendre les mesures les plus sévères, mais rien n’arrêtait le soldat ; il était victorieux, il avait beaucoup souffert, il avait acheté sa conquête au prix de son sang, il y aurait eu folie à vouloir l’arrêter. Le pillage, exercé d’abord par les soldats, s’étendit ensuite aux officiers, et quand on évacua Constantine, il s’est trouvé, comme toujours, que la part la plus riche et la plus abondante était échue à la tête de l’armée et aux officiers de l’état-major… Je ne m’appesantirai pas davantage sur ces scènes le pillage et de désordre ; elles ont duré trois jours. Jetons un voile épais et ne ternissons pas notre gloire et nos souvenirs.» (Saint Arnaud)

Zineb Merzouk

Sources :

  1. « L’Algérie Ancienne et Moderne depuis les premiers établissements des Carthaginois jusqu’à l’expédition du général Randon en 1853 » M. Léon Galibert, pp. 490 et 491. Furne et Cie, libraires-Editeurs (1861)
  2. « Les deux sièges de Constantine (1836-1837) » Ernest Mercier, imp. Poulet (Constantine), 1896
  3. « Recueils de documents sur l’expédition et la prise de Constantine par les français en 1837 » J. Corréard, éditeur d’ouvrages militaires (1838)
  4. « Les deux sièges de Constantine. Deuxième siège-1837. » (Lettre décrivant l’assaut du 13 octobre 1837) Narration du Maréchal de Saint Arnaud (In algerie-ancienne.com)
  5. Illustration : Eugène Flandin, attaque de la brèche de Constantine, 1837

 

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