Tayeb Brahim Fatiha la miraculée

Issues d’une grande famille militante d’El Gâada de Sig, et à Sidi Bel-Abbès où elles ont grandi, les Tayeb Brahim ont côtoyé d’autres femmes de l’OC FLN comme Affane Fatima, les sœurs Azza Saleha et Djamila, El Fekaïr Melouka, Bendimered Soraya, Sekkal Hafida et El Kheir Nebia. C’est ainsi qu’à 15 ans en 1959 et grâce à Cherifa sa sœur ainée de 5 ans qu’elle rejoint le maquis de la Mekerra à bord d’une charrette, alors qu’elle est infirmière dans un cabinet privé à Sidi Bel-Abbès.

Véritable miraculée de l’Histoire, elle survit à deux violents accrochages et au lors du dernier en 1959 à Tenira, elle est atteinte de 17 balles au milieu de ses compagnons de l’ALN qui décèdent, et sombre dans un profond coma. Donnée pour morte, elle restera hospitalisée pendant 5 mois à l’hôpital de Sidi Bel-Abbès et à son réveil, transférée au centre de Rio Salado (El Maleh) pour y être torturée, puis au quartier général de la légion étrangère et enfin à la prison d’Oran après sa condamnation.

Tayeb Brahim Fatiha, dite Djamila est finalement libérée le 30 avril 1962 pour assister à la mort de sa sœur Cherifa, dite Soraya, tuée dans une embuscade de à l’âge de 23 ans en mai 1962 à quelques jours de l’indépendance alors que le cessez-le-feu avait été proclamé. Les militaires ont vidé leur chargeur sur elle, et décédée, on raconte même qu’elle aurait été découpée sur place, devenue un poison pour l’armée française. Car même morte, les Français doutaient de son identité et avaient envoyé un officier à son domicile en demandant à la voir. C’est Fatiha, alias Djamila, qui répond qu’elle est absente et l’officier est soulagé, il annonce que l’armée l’a tuée. Fatiha est touchée mais lance un “Tahia el Djazaïr”, ce qui irrite le militaire qui s’apprête à tirer sur elle pour se raviser : “Une pas deux.” Fatiha échappe encore à la à la mort dans l’ombre de sa grande sœur.

   A l’indépendance, la miraculée reprendra son métier d’infirmière pour exercer au sein des structures hospitalières puis occupera plusieurs fonctions dans la santé, devenant sous-directrice de la direction de la santé. Elle fera aussi de la politique, membre du conseil de l’Union des femmes algériennes, membre du conseil de la mouhafadha du FLN, remplissant ensuite deux mandats d’APC et deux mandats d’APW. Vivant toujours à Sidi Bel-Abbès où est enterrée sa sœur, elle part en retraite en 1994. Rescapée, humiliée, torturée et admirée ensuite, elle ne s’est jamais mariée.

Chawki Amari

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