«J’écris ton nom, Liberté»
Spartacus est à l’origine d’une grande révolte d’esclaves qui a fait vaciller la République romaine. Pour les Européens, depuis le XVIIIe siècle, son nom symbolise la révolte des dominés. Il a même désigné un mouvement marxiste-léniniste allemand du début du XXe siècle, à l’origine du parti communiste allemand.
Un héros de la liberté
L’affaire se déroule en l’an 73 avant Jésus-Christ, dans les derniers temps de la République romaine, à Capoue, en Campanie. Une poignée de gladiateurs s’enfuient d’une école et gagnent les pentes du Vésuve.
Ils se placent sous les ordres de trois chefs charismatiques, Oenomaüs, Crixus et surtout Spartacus. Son nom vient de Sparta, une ville de Thrace, au nord de la Macédoine, où il est né vers 100 av. J.-C.
Berger devenu soldat dans un corps auxiliaire romain, il a tenté de déserter avant d’être repris, réduit en esclavage et vendu comme gladiateur au directeur de l’école de Capoue, un laniste (entraîneur de gladiateurs) de grande réputation dénommé Lentulus Batiatus.
Sous sa férule, Spartacus est devenu un gladiateur d’exception. Comme tous les gladiateurs esclaves de la République romaine, il n’en est pas moins méprisé par le public des arènes (c’est seulement sous l’Empire, au début de notre ère, que les gladiateurs acquerront prestige et richesse, à l’égal de nos vedettes sportives).
Son escapade à la tête de quelques désespérés serait passée dans les oubliettes de l’Histoire si des esclaves surexploités dans les immenses propriétés agricoles des environs n’avaient rejoint les fugitifs. Bientôt, la petite troupe réunit plusieurs dizaines de milliers d’esclaves, de gladiateurs et de déshérités. Elle échappe à l’encerclement du Vésuve et prend à revers la légion du consul Gellius envoyée par Rome pour mettre fin à la rébellion.
Plusieurs centaines de prisonniers sont condamnés à s’entretuer deux à deux sous les yeux ravis des ex-gladiateurs ! Énivrés par leurs succès, les esclaves pillent l’Italie au grand dam de leur chef qui eût préféré les conduire vers les Alpes, hors d’atteinte de Rome.
Une scission se produit alors entre les partisans de Spartacus et ceux de Crixus. Le second veut poursuivre son avantage en pillant les riches campagnes du sud de la péninsule italienne. Spartacus voudrait quant à lui se diriger vers le nord et gagner des terres libres au-delà des Alpes. Les deux troupes se séparent donc. Crixus se dirige vers le sud où lui-même et ses hommes sont bientôt exterminés par les légions romaines. Quant à Spartacus, il prend la route du nord puis se ravise et décide de gagner le sud de la péninsule et de prendre la mer vers son pays natal…
Rome prise de frayeur
Cette révolte est la troisième « guerre servile » qu’ait à subir la République romaine. Ce sera aussi la dernière. Les deux premières ont affecté la Sicile, suite à l’appropriation de ses terres à blé par les chevaliers romains et leur transformation en pacages extensifs.
Aux alentours de l’an 140 av. J.-C. et à nouveau aux alentours de l’an 100 av. J.-C., la province fut en effet secouée par de violentes jacqueries que Rome réprima à reculons, aucun général n’éprouvant de fierté à affronter les esclaves.
Face à Spartacus et ses gladiateurs, le Sénat est à nouveau pris de frayeur. Ses meilleures légions étant en Espagne, il confie au préteur Marcus Lucinius Crassus le soin de mettre fin à la jacquerie.
Crassus est un ancien lieutenant de Sylla qui s’est outrageusement enrichi à la faveur des proscriptions. Il arme douze légions et traque les esclaves fugitifs. Évitant le combat frontal, il suit Spartacus jusqu’à la pointe de la péninsule, en face de la Sicile, et érige des fortifications de fortune sur une cinquantaine de kilomètres pour l’empêcher de se replier.
Spartacus négocie le passage en Sicile avec des pirates mais ceux-ci disparaissent sitôt qu’ils ont encaissé le prix de la traversée. Il ne lui reste plus qu’à revenir en arrière. Il arrive avec audace à franchir les fortifications romaines et, finalement, affronte les légions un peu plus au nord, en Lucanie.
Submergés par le nombre, les révoltés succombent. Spartacus lui-même est tué au combat. Au nombre de six mille, les survivants sont crucifiés le long de la voie qui mène de Capoue à Rome, dans l’agonie la plus longue et la plus douloureuse qui soit. C’est la plus grande crucifixion de masse qu’aient jamais opérée les Romains.
Là-dessus, Pompée revient en hâte d’Espagne et croise sur son passage une poignée d’esclaves qui ont échappé à la sauvage répression de Crassus. Il les extermine sans faire de détail avant de faire sa rentrée à Rome. Habilement, il va en tirer argument auprès des Romains et des sénateurs pour s’attribuer tout le mérite de la répression, au grand dépit de Crassus, son futur allié au sein du premier triumvirat.
Source : Herodote.net
Image à la une : la mort de spartacus par Hermann Vogel, 1888