Le mariage traditionnel dans El Qaçba zeman – Partie II – Les préparatifs

Officiellement on débute les préparatifs huit jours avant la nuit de noce qui a pratiquement toujours lieu la nuit du jeudi à vendredi. Pendant plusieurs jours on fait des gâteaux et on roule du couscous. Toutes les voisines viennent en aide.

On commence à lancer les invitations – Es-sadan – oralement au tout début de la semaine. Les deux familles font appel à la marieuse, une dame bien introduite dans les foyers pour transmettre les invitations. Les pères des jeunes mariés invitent eux-mêmes leurs proches et leurs amis.

Les jours du t’arouis : ce sont les jours précédant la nuit de noces

A partir du moment où le contrat de mariage a été rédigé, les jeunes mariés ne doivent pas se voir avant la nuit de noce. Ils doivent, chacun de leur côté, observer certaines règles :

Le jeune homme ne doit pas voir ses parents ou toutes personnes âgées pouvant l’inciter à montrer à leur égard quelques pudeurs. Néanmoins, au bout de deux ou trois jours le père tient à voir son fils pour s’assurer de son état d’esprit. Le fils est obligé de rompre provisoirement cette retraite et baiser le front de son père pour le rassurer et le remercier. Le prétendant reprend ensuite sa retraite, entouré de ses amis qui servent aussi d’intermédiaire entre lui et son père.

La jeune fille ne doit pas se montrer à son père ou ses frères (sauf s’ils sont plus jeunes qu’elle). On la soustrait aussi aux regards des voisines pour éloigner le mauvais œil. Les deux familles protègent les tourtereaux du mauvais œil ou d’un mauvais sortilège. Ils surveillent les faits et geste des proches comme des voisins.

Le bain de la mariée : la future mariée est emmenée au moins trois fois au hammam afin de la mettre en beauté avant la nuit de noce.

La veille de la nuit de noce, le hammam tout entier est réservé pour cet évènement, auquel ne sont invité que les proches et deux ou trois dames amies de la famille, ainsi que deux ou trois amies de la jeune mariée qui sont reconnaissables à leurs cheveux tombant en tresses ou tirés en arrière entourés d’un ruban – qardoun.

Tout un cortège de femmes, à pied, suit la fiancée. Elle est couverte de la tête au pied d’un long voile de soie. Personne ne doit voir son visage. De la maison de la jeune fiancée au hammam on entend des youyous et des chants. Une fois arrivée, la maachta et nadrat el hammam (la propriétaire du hammam), s’occupent d’elle. C’est un moment magique pour la mariée « le bain d’embellissement » ainsi elle sera prête pour la nuit du henné au cours de laquelle on lui fait une sorte de tatouage sur les pieds (jusqu’aux chevilles) et sur les bras (jusqu’au coude).

Le henné du marié : les parents du jeune marié organise la soirée quelques jours avant la nuit de noce, après salat el maghrib. Les invités ne sont pas nombreux (que des proches et quelques amis). Musique et youyous retentissent, le meddah et sa troupe font le tour de wasst edar en jouant le traditionnel zorna. La musique dure jusqu’à tard dans la nuit, parfois même jusqu’à l’aube.

Le jeune marié dine dans sa chambre avec ses amis. Il se rend ensuite dans ouest dar pour la pause du henné, enveloppé de son burnous, la figure entièrement cachée dans sa capuche. Un ami à droite, un autre à gauche,  chacun tenant un cierge allumé, on le fait asseoir sur un coussin. Le barbier, el hadjam, s’avance vers lui avec une tassa contenant le henné et lui remet deux œufs en lui demandant de les casser du premier coup, en les serrant dans sa main au-dessus de la tassa. Il y ajoute quelque goutte d’eau de rose avant de procéder au mélange.

La pause se fait sur le pouce et l’index : application dite « es saif » le sabre. La forme rappelle vaguement un yâtâghân (arme blanche des janissaires aux 18è.s. C’est un genre de sabre à deux pointes incurvées en deux sens opposés.). Le barbier achève d’envelopper d’un tissu de satin blanc la main du marié pour protéger le henné, il en met ensuite aux jeunes garçons de la fête. Les youyous et la zorna reprennent plus fort que jamais incitant quelques personnes aisées à faire des dons – rachqa –  à la troupe de zorna.

Le jour de l’accrochement – El Ta3lak – du trousseau de la mariée

Les  proches parents de la fiancée, sans la mère, portent chez le futur époux le trousseau de leur fille afin de le ranger dans la chambre nuptiale. Avertis plusieurs jours auparavant les parents du marié ont déjà apprêté la chambre. Ils l’ont repeinte en « nili », bleu indigo, et l’ont agrémentée de petits meubles : d’un grand miroir, de quelques étagères, d’une commode, d’une armoire et d’un lit « banq el kouba ».

Les proches de la fiancée défont les paquets et mettent tout en place. Le lit nuptial est préparé : on installe le matelas et le traversin, on met les draps, les coussins et la couverture. Gâteau, thé, café, citronnade sont servis. Une fois la tache achevée plus personne n’a le droit de dormir dans la chambre, pas même le marié.

A SUIVRE…

Synthèse

Source : « La casbah d’Alger autrefois – Le mariage » de Kaddour M’hamsadji

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