Les Aurès ou la région plurimillénaire -partie II

Quelle que soit leur appartenance tribale, les Chaouis se sont toujours distingués par leur esprit de résistance farouche à toute invasion, depuis l’antiquité à nos jours.  

Dans le pays auréssien, les Massyles et les Masaesyles composent respectivement deux royaumes. Le premier se situe à l’est, il sera dirigé par Massinissa, fils du roi Gaïa qui est l’allié de Carthage. Le second est à l’ouest sous la direction de Syphax. A partir de sa capitale Cirta, il a pu asseoir sa domination dans une grande partie du Nord de l’actuelle Algérie. Ces deux grandes tribus constituent un ensemble : la Numidie durant la période antique (IIIe  siècle avant J.-C). Nombre d’historiens considèrent que ces deux forces symbolisent un fait exceptionnel dans l’histoire d’Afrique du nord. En d’autres termes, les deux rois auraient pu persévérer dans la construction d’un Etat, assurer son développement en rassemblant toutes les tribus berbères sous la même bannière. Ils vont plutôt révéler au grand jour leurs rivalités.

 

Massinissa s’est allié à Rome aux côtés de Scipion, le surnommé l’Africain, qui a mis fin à la suprématie de Carthage. Syphax s’est rangé dans le camp du carthaginois vaincu. Il sera arrêté par son « frère ennemi » numide lors d’une dernière bataille, à l’est de Korta, le long du fleuve Ampsaga (Rhumel actuellement dans le Constantinois). Il meurt en prisonnier à Rome (202 avant J.-C).   

 

L’Etat de Massinissa  

Le voilà, Massinissa, seul à la tête des deux royaumes numides. Il ambitionne l’unification de toutes les tribus des Aurès, mais aussi de toutes celles d’Afrique du nord. Il lance sur son territoire les fondements d’un Etat, non sans imposer la sédentarisation aux nomades. Car il cherche à les initier à l’agriculture, selon les techniques observées à Carthage où il a auparavant vécu. Il introduit un nouvel outillage pour améliorer la condition des cultivateurs et par là même celle de toutes les catégories sociales. Il administre avec respect, mais avec rigueur le commerce et les finances. Il n’empêche que son rêve d’homme d’Etat va s’estomper. La paix est rompue par Rome qui se décide pour la destruction de Carthage. Les légions romaines y débarquent en 149, ce qui fait le mécontentement de Massinissa. Il voit en cela la fin d’une paix. Toujours est-il que la Numidie, représentée par ce dernier, reste pour nombre d’Algériens, aujourd’hui, une référence en termes de première tentative d’Etat. Elle est également celle qui rappelle le caractère guerrier du Chaoui.

Comme l’affirme l’auteur Georges Hardy, « le pays chaouia apparaît comme un bloc de résistance, à tous les moments de la vie algérienne, un groupement qui refuse de renoncer à son être, comme un refuge pour les éléments rebelles des pays environnants ». Les Auréssiens, bien attachés à leur passé et à leur identité amazighe, ont pu conserver cet esprit de résistants, y compris au sein du Mouvement national pour l’indépendance algérienne.  

 

Mohamed Redouane   

 

Bibliographie:

  1. Massinissa (-240 env.–149roi des Numides. Encyclopædia Universalis.  
  2. Une région historique de l’Algérie : le pays Chaouia, Georges Hardy. Revue d’histoire des colonies, tome 37, n°130, 2e trimestre 1950.  
  3. Illustration 1: https://fr.wikipedia.org/wiki/Numidie#/media/File:Numidia_220_BC-fr.svg
  4. Illustration 2: https://chawi19.skyrock.com/3.html

 

 

 

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