La vache qui pleure, un chef-d’oeuvre artistique préhistorique

L’invention de l’agriculture par l’Homme, marque son entrée dans le néolithique (9000 AV.J.-C.); ses outils sont plus variés et le plus souvent, polie. Au terme de milliers d’années d’évolution, l’Homme s’établit pour vivre autrement; et s’attache de plus en plus à ses lieux en vue d’une sédentarisation. Il passe donc d’une économie de prédation, à une économie de production, et de domestication animale. 

De nombreux endroits portent encore les traces de cette évolution, et en poursuivant la pratique héritée de ses ancêtres, l’Homme du paléolithique continue de relater par la gravure et la peinture, tout ce qui est relatif à son quotidien ou à sa spiritualité.

C’est dans l’Atlas Saharien, et au Sahara central, notamment aux différents tassilis et au Hoggar, que l’on retrouve les diverses réalisations de ce qui constitue  l’art rupestre saharien. Il rassemble plusieurs milliers d’œuvres répertoriées depuis le début des découvertes (19e siècle), et continue de fasciner les chercheurs du monde entier.

Pourquoi la vache qui pleure, pleure-t-elle?

La période de l’art rupestre caractérisée par l’omniprésence de la représentation du bovin : le bovidien, nous renseigne sur le quotidien des agriculteurs du paléolithique. 

Une des gravures les plus emblématiques du Tassili n’Ajjer est sans conteste celle des bovidés Tigharghart, plus communément nommée :  la vache qui pleure.

La fresque se trouve à environ 25 Km de Djanet, sur le mur plat d’une montagne. Elle représente un petit troupeau de bovidés; les spécialistes précisent que c’est un bas-relief car cette gravure est différente de celles réalisées par piquetage. Les sillons creusés dans la roche apportent une toute autre dimension, et un réalisme sans précédent. C’est un chef-d’oeuvre de sculpture.
L’autre originalité de la gravure, datée de plus de 70000 ans réside dans la figuration en larme des bovidés, ce qui a donné suite à  plusieurs interprétations. Selon certains, lorsque l’eau manque dans l’organisme des vaches, leurs yeux secrètent un liquide… Selon d’autres, il s’agit simplement d’une marque de couleur différente du reste du corps de l’animal. Mais la légende la plus répandue, et celle que vous raconteront les guides si vous êtes en visite dans la région, est la suivante :  « ces vaches venaient pâturer dans le coin, et il y avait une guelta d’où elles s’abreuvaient. Pendant les périodes de sécheresse, il devenait rare de trouver de l’eau, d’où cette larme qui coule de l’œil de ces vaches. L’artiste a voulu immortaliser cette image en faisant cette gravure »*. Il convient de préciser que la désertification ne s’est pas mise en place de façon linéaire ou subite. Des fluctuations climatiques ont en effet provoqué une alternance entre période humides, qui encourage et favorise l’installation humaine, et les période aride. 
 
Le bovidien, constitue une période faste de l’art rupestre saharien. Il connaît plusieurs formes de figuration, et quittera peu à peu sa fonction purement économique, pour à investir par la suite l’espace sacré.

Mira B.G

 

Sources : 

  1. Nadjète Ain Sebaa, « Contribution, à la connaissance de l’art rupestre dans l’Ahaggar« , Alger,  mai 1996
  2. L’Algérie en héritage, art et histoire, institut du monde arabe
  3. Crédit Photo : Mira Gacem

 

 *Mohamed Beddiaf, DG de l’Office du Parc National du tassili n’Ajjer (OPNT), dans un article paru sur le quotidien El watan.

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