La perte d’Alger (14 juin – 5 juillet 1830)

L’armée de Hussein Dey, sous la conduite de Brahim Agha, livre à Staouéli une bataille sanglante à l’armée de conquête française et son général de Bourmont qui ont débarqué à Sidi Fredj quatre jours plutôt. La bataille s’est terminée à l’avantage des conquérants, obligeant le dey à leur livrer la ville. la machine coloniale est en marche…!

Le 14 juin 1830, trois ans après l’affaire du « coup d’éventail », l’armée d’occupation française débarque à Sidi Fredj, à une vingtaine de kilomètre à l’ouest d’Alger. Commandée par le général de Bourmont, cette armée est composée de plus 37 000 hommes. Elle a quitté le port de Toulon le 25 mai pour arriver à Sidi Fredj vingt jours plus tard, selon un plan de débarquement dressé en été 1808 par l’officier espion Vincent-Yves Boutin, à la demande de Napoléon.

Les troupes du Dey offrent une résistance (bataille de Satouëli le 19 juin et de Sidi-Khalef le 24 juin), rapidement réprimé par l’ennemi.  Alger est atteinte le 29 juin. La flotte bombarde la ville, et le fort l’Empereur qui protège Alger vers l’intérieur est pris le 3 juillet, après que les Turcs aient fait sauter le dépôt de munitions avant d’abandonner la position. La population demande au Dey de capituler avant l’assaut des Français. Le 5 juillet Alger est prise, et le Dey, refusant de se replier sur Constantine part en exil pour l’Italie le 15 du même mois. 

Officiellement ce débarquement se voulait une réaction de la France atteinte dans son amour-propre après que le Dey Hussein eut donné le 29 avril 1827 un « coup d’éventail » au consul français Deval après une vive discussion sur le refus de la France d’honorer ses dettes contractées en 1800 envers l’Algérie.

L’on sait aujourd’hui que les réelles raisons son ailleurs, et bien moins « honorables ». Il s’agissait en réalité d’une volonté de renouer avec les temps napoléoniens et ainsi de consolider l’influence de la France dans le bassin occidental de la Méditerranée, par l’ouverture de marchés et de débouchés au commerce et à l’industrie naissante. De plus, Il ne faudra pas attendre longtemps pour que les véritables raisons de l’agression française contre l’Algérie apparaissent au grand jour, car aussitôt après son entrée à Alger, le général en chef de Bourmont, adressa l’ordre du jour suivant à son armée : 
 » Soldats, 
La prise d’Alger était le but de la campagne. […] L’éclat qui doit en rejaillir sur le nom français aurait largement compensé les frais de la guerre, mais ces frais mêmes seront payés par la conquête. Un trésor considérable existe dans la Kasbah… »

Temoignage de Hadj Ahmed Effendi sur la perte d’Alger : 

Hadj Ahmed Effendi, natif d’Alger muphti à Alger au moment d’expédition française, finit gouverneur d’Alagah en Anatolie, où il mourut en 1861. C’est l’unique témoignage sur l’expédition, écrit par un algérien. Hadj Ahmed Effendi confirme l’incident du coup de l’éventail, et l’acceptation de la soumission par le dey, mais il signale : 

« Quant à moi, ne pouvant m’y décider, j’assemblai les pieux musulmans et, tout en leur exposant ce qu’il y avait de glorieux dans le martyre et quelle était la récompense réservée à ceux qui savaient se dévouer à la cause de Dieu, je les engageait à me suivre (contre l’ennemi). Effectivement ils firent pénitence, et après s’être réciproquement pardonné leurs pêchés, ils se mirent derrière moi, en entonnant le bruit du tekbir (Dieu est grand). Les femmes se précipitèrent au-devant de nous, jetant leurs enfants à nos pieds, et s’écriant : »c’est bien si vous êtes vainqueurs, si vous ne l’êtes pas, sachez alors que les infidèles viendront nous déshonorer. Partez donc, mais avant de partir immolez-nous ».

Pendant que je m’efforçais d’apaiser les femmes, le pacha me fit chercher et me dit : « Sache mon fils, que j’ai désobéit à notre souverain, qui ne m’a point autorisé à agir comme je l’ai fait. Aussi, ai-je succombé. Tel est le sort de ceux qui se mettent en opposition avec leur padichah ». Ces paroles, je les transmis aux soldats, en leur faisant comprendre que puisque le khalife était contraire à la guerre, la religion nous commandait de ne pas la continuer ».

Ahmed Effendi réussit à obtenir le libre départ de ceux qui voulaient quitter Alger et la promesse de sécurité pour ceux qui voulaient rester. En définitive, il arriva à Constantinople :  » Finalement je suis ici, avec ceux qui ont émigré dans cette direction. Cependant, partout où éclatera la guerre sainte, je m’y rendrai, oh! Certes, je m’y rendrai; et ce n’est qu’avec ma vie que je renoncerai à la guerre sainte. Plaise à dieu que cela soit ainsi « . 

Mira B.G

 

Sources :

  1. M. Keddache, l‘Algérie des Algériens
  2. Témoignage d’Ahmed Effendi, recueilli par Ottocar de Shlechta, extrait n° 11 de l’année 1862, du Journal Asiatique
  3. https://www.djazair50.dz/?14-juin-1830-l-Armee-d-occupation

 

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