Pour s’assurer de l’état de la bru, la belle-mère fait venir la vieille dame du village qui doit l’ausculter à jeun, avant d’uriner, afin que le germe ne se réfugie pas dans la vessie. Après l’auscultation, elle confirme en donnant la date approximative de la conception, mais on ne dit rien au dehors jusqu’à ce que les trois premiers mois soient écoulés.
Une fois confirmée, on prend toutes les précautions à l’égard de la bru. Son mari ou son beau-père fait écrire pour elle une amulette chez le marabout qu’elle doit accrocher à sa ceinture. Une amulette que l’on fait nouer par le marabout lui-même. Cette amulette éviterait, selon les croyances, toute mauvaise conséquence, un éventuel avortement, par exemple. Pour cela, et en plus des effets de l’amulette, on demande à la future maman d’éviter les gros efforts. On ne lui fait pas porter de grosses charges de bois, d’herbes et de branches de frêne.
A table, on brise cette loi qui impose le même régime alimentaire à tout le monde, en cédant aux envies de cette bru en la servant non seulement la première mais on lui demande également ce qu’elle désire et on lui réserve sa part de gourmandises rapportées du marché ou préparées à la maison. Selon les croyances, on ne doit rien manger devant elle sans lui en donner. En effet, les Berbères croient que la femme dans cet état peut engendrer un enfant portant la marque indélébile de son envie non satisfaite. C’est ainsi qu’on voit des enfants naître avec des excroissances de chair, des taches rouges ou noires sur le visage ou sur le corps.
Par exemple, une femme mangeant l’oignon qu’elle désirait lui éviterait d’avoir un enfant chauve comme un oignon, «am tabselt». Si la femme n’a pas ce qu’elle désire, il lui faudrait éviter de se gratter le visage ou un endroit découvert du corps afin d’éviter à l’enfant d’en avoir la marque, voire la forme, sur l’endroit gratté, ou simplement touché… La suite sur le numéro 1 de notre revue Babzman
Mounira Amine-Seka
- Illustration : Peinture de Sofiane Dey