Du blanc de céruse à la poudre de riz, les femmes ont fait mal à leur peau

Les rides, les tâches brunes, les tâches de rousseur, les crevasses dues à l’acné ou encore de plus simples imperfections, les femmes auront tout essayé pour camoufler tout cela en se maquillant …

Teint blanc, cheveux noirs, joues et lèvres rouges, tels étaient les critères de beauté au XVIIIe siècle, en Europe. Seulement, cette poudre qu’on appliquait sur le visage pour l’obtention de ce blanc d’«aristocrates» était nuisible, puisque c’était le blanc de céruse qui n’était autre que le blanc de plomb, oxalate de zinc, bismuth. Les compositions les moins néfastes contenaient du talc de Venise ou de la craie de Briançon, mais elles s’écaillaient rapidement et les imperfections du visage réapparaissaient !

Le blanc de céruse qui existait déjà depuis l’antiquité, se fait présent à la Cour de France, du temps de Catherine de Médicis, puis se démocratise en se répandant dans la bourgeoisie parisienne. Il eut tant de succès que la production française ne répondait plus à la demande ; alors, on en importa de Hollande et d’Anglerre, mais Venise en fournissait la meilleure qualité.

Au XVI et XVIIe siècles, le blanc de céruse était mélangé à des graisses, de la cire, mais aussi, associé à des produits minéraux ou métalliques, comme l’alun, le camphre, le vif-argent ou encore le souffre ou le sel de tartre, qu’on appliquait en couches épaisses, dans le but de combler les crevasses, les rides et les tâches brunes et les rousseurs grâce à son effet corrosif. La médecine, alors, dénonce les effets néfastes et J. Savary des Brûlons explique, en 1748 : «Ce poison est dangereux quand il opère au-dedans et il fait même sentir au-dehors sa malignité puisqu’il gâte la vue et les dents et fait venir des rides plus tôt qu’on en aurait.»

Dès le XIXe siècle, on se rabat sur le talc, la poudre d’amidon et le rouge est également délaissé, car on préfère être maquillé tout en restant naturel ; et on abandonne cela aux comédiens de théâtres. Sur le modèle d’Emma Bovary, les femmes de ce siècle,  réfèrent démontrer leur fragilité plutôt que les tons rosés de leur teint. Certaines, d’ailleurs, ne se nourrissaient presque plus, s’abreuvant de vinaigre et de citrons et dormais un minimum pour favoriser les cernes. La peste, alors, eut de la côte, puisque le teint pâle, les yeux cernés, les cheveux épais et la taille fine étaient les critères de beauté de l’époque ! A la fin du XIXe  siècle, la poudre qui, jusque là, était un moyen de blanchir le teint, devint un moyen de le matifier et on se rabat sur la poudre de riz. Une poudre absorbant l’humidité du visage, adoucissant la peau et la raffinant, tout en camouflant les imperfections, les rougeurs et les rousseurs. En Algérie, durant la période coloniale française, certaines femmes de l’aristocratie algérienne en utilisaient el poudouri (la poudre de riz), à chaque occasion de fête ou de rencontres.

Au début du XXe siècle, dans les années 30, la femme ne devait plus avoir une peau mat, mais les critères de beauté dictaient la silhouette mince, sportive, cheveux coupés courts, avec un maquillage soutenu et la peau non pas blanche, mais bronzée. Au Maghreb et à l’Ouest de l’Algérie, pour avoir un teint hâlé, les femmes ont un savant mélange d’huile d’olive, de pierre d’alun, de henné et d’argile qu’elle étalent sur le corps, avant de procédé au gommage, lors de leur passage au bain maure.

Aujourd’hui, la médecine conseille de ne point utiliser les cosmétiques, mais de bien se nourrir et hydrater sa peau, pour mettre en valeur sa beauté naturelle.

Mounira Amine Seka.

Bibliographie: 

  1. PIERI, Jacques, Quand le hâle était honni, in Nouvelles Esthétiques, décembre 1989, p. 51-58.
  2. ANDRIEU, Bernard, Du teint hâlé honni, au bronzage de rigueur, in Cerveau & Psycho n° 22.
  3. Illustration: https://www.focus-mode.com/6512623/secret-de-beaute-n2-la-beaute-au-temps-de-marie-antoinette-d-autriche/

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