Chakhchoukha est un mot berbère qui signifie mélanger, tremper dans la sauce. A la base, il s’agit soit d’une pate fine cuite au tajine puis émiettée, soit d’une fine galette à moitié cuite au tajine et également émietté (chakhchoukhat edfar). De ces deux bases, on abouti à des plats fastueux, préparés spécialement lors des grandes occasions, telles que les repas de mariages, de circoncisions, de fêtes religieuses… Lors de ces circonstances, la chakhchoukha dans ses deux formes, se sert arrosée de sauce rouge épicée, à la viande et/ou au poulet, et garni de pois chiches. Dans certaines régions, le plat contient également des légumes.
Ainsi, on retrouve chakhchoukhat edfar à Constantine, Sétif et Annaba, et celle des feuilles, dans les Aurès et jusqu’au Mzab et au Hoggar.
Cependant, en dehors des grandes occasions, on utilise cette même base (feuille ou galette émiettée) pour la préparation de plats plus simple et à même de contenter une famille nombreuse, d’où le fait qu’on les range dans la catégorie des plats du pauvre.
La chakhchoukha de galette se prépare par exemple avec des fèves et du lait, dans lequel elle doit mijoter. Généreusement beurrée, elle devient très consistante et nourrissante, notamment en hiver.
Celle des feuilles, se présente aussi avec du lait, à l’Est ou encore en Kabylie où on l’arrose d’huile d’olive à la place du beurre.
D’autres variantes se présentent en sauce blanche, accompagnée de légumes, ou de sauce rouge à la graisse séchée, mais sans aucune viande.
En cherchant dans des forums sur le net, on peu découvrir des versions sucrée, généralement aux dates (ghars). Et il est fort à parier que ce genre de préparations existent aussi à l’Ouest, dans la mesure où le trid a pour base les mêmes feuilles que la chakhchoukha.
Au Nord, à Cherchell et à Alger, il subsiste encore une ancienne recette de chakhchouka…au pain ! Hé oui, cela parait invraisemblable et pourtant, elle est délicieuse ! La préparation est très simple, elle se rapproche beaucoup de celle de la chorba algéroise ou du qatâa ouarmi (coupe et jette), mais ne contient ni viande ni pois chiches. En fin de cuisson, on rajoute du pain rassis émietté. Quelques bouillons et le plat est prêt à la dégustation !
Ce sont là des plats que nos ancêtres mangeaient souvent, en plus du couscous et d’autres mets. Les femmes ayant appris à composer avec les moyens de bords, principalement durant les temps difficiles (la colonisation, par exemple), pour préparer une chakhchouckha simplifiée, peu couteuse mais qui rassasie une famille nombreuse.
Par contre, un peu comme l’histoire de l’œuf et de la poule, on ignore si c’est la recette des grandes occasions qui a précédé la recette des « pauvres », ou l’inverse.
Khadidja T.