Contribution : LE PATRIMOINE ARCHEOLOGIQUE ET LA JEUNESSE

L’histoire de l’antiquité algérienne consacre une grande séquence historique à la riche contrée archéologique constituée par Cherchell (Caesarea) l’antique capitale numide des descendants de Massinissa et par Tipasa son prolongement historique et naturel.

Hélas, une grande partie de  notre jeunesse, ignore l’histoire de cette contrée. Elle ignore les beaux vestiges antiques abandonnés par les civilisations qui ont traversé et modelé cette région. Cette jeunesse ignore le message et le langage des belles « mosaïques des 09 muses », ou celles des « vendanges » . Nos jeunes n’ont pas encore compris le rôle des merveilleux aqueducs qui parsèment le trajet de la route nationale N°11, jusqu’aux confins du tombeau de la Chrétienne et qui y ont contribué à alimenter une ville de plus de cent mille habitants d’après « Stéphane Gsell ».

Mademoiselle S.FERDI, l’ancienne conservatrice du Musée de Tipasa, auteure d’un célèbre et éminent ouvrage sur les Mosaïques Antiques a le mérite d’avoir évoqué le « désintérêt culturel vis-à-vis de la chose du passé » de la part de nos jeunes.

A ce sujet  cette dernière  s’est insurgée contre certains concepts dépassés en affirmant: « Il ne faut pas croire que l’archéologie soit l’apanage des nostalgiques du passé ou un domaine réservé strictement aux spécialistes.. »
Mais certaines voix discordantes lui ont répondu par dépit « Est-ce qu’on a investi dans le sens de vulgariser une meilleure connaissance de cette portion de notre histoire ? ». Ces derniers ont argumenté que « l’immense investissement consenti dans la protection des sites actuels de Cherchell, de Tipasa et de Bérard, n’a pas permis une restauration totale et un sauvetage permanent  de ces antiquités, exposées à la corrosion saline de la mer, aux intempéries ou au rayonnement fatal du soleil sur les mosaïques.

Monsieur BENSALAH Aek, éminent archéologue, spécialiste  en antiquité, ancien responsable de l’atelier de mosaïque de Cherchell et restaurateur de la prestigieuse fresque de mosaïque des « 09 muses » (09 mètres sur 05); (visitée par de prestigieuses personnalités, à l’instar de  l’ambassadeur des Etats-Unis) a été   formel sur cette notion de protection : « on s’est investi à fond dans le travail de restauration et de sauvetage de ces trésors antiques en vue de le préserver des agressions marines et solaires ,en y appliquant des vernis spéciaux de protection sur les fresques de mosaïques », nous dira-t-il

Quant à Mademoiselle S.FERDI, l’ancienne  conservatrice  du Musée de Tipasa, elle nous avait donné son point de vue sur  l’engouement des Jeunes pour la chose antique : « La présence des jeunes sur certains sites est plus élevée que sur d’autres. Ces choix s’expliquent par l’attrait et la charge  émotionnelle qu’éveillent certains sites et monuments, mais aussi par l’influence d’une certaine publicité touristique. La plupart  de ces jeunes visitent ces sites en groupes organisés quand la visite est officiellement programmée dans le cursus scolaire ou le circuit touristique, plus rares que les visites en famille, car les jeunes  aspirent à une certaine connaissance personnelle loin du regard des parents. »

Plus loin Mlle S.FERDI s’était interrogée : « comment se comportent  ces jeunes  vis-à-vis du patrimoine ? » Elle releva avec  amertume : « on constate un désintérêt culturel, pour ce qui est considéré comme : pierres du passé, choses muettes, pour lesquelles, ils ne s’identifient pas. »

Son diagnostic à ce sujet  a été  sévère :  « Souvent des groupes scolaires déferlent dans les lieux de visite  par centaine et pour une durée limitée, sans choix des circuits à suivre, une liste de monuments et vestiges à voir qui sont  préétablie par l’encadreur, l’accompagnateur ou les parents. Cela ressemble plus à un marathon qu’à une communion avec un site. Les structures d’accueil quand elles existent, manquent de souplesse, d’efficacité, d’audace et d’ingéniosité pour capter l’intérêt des jeunes et même pour alimenter leur rêve et leur imagination. »

Ce constat de l’ancienne conservatrice du célèbre musée à ciel Ouvert de Tipasa , est très éloquent et d’une justesse qui nous permet de poser plusieurs interrogations, notamment celles relative au principaux sites et vestiges qui existent et pour lesquels des centaines ,voire des milliers de touristes étrangers, font de lointains  déplacements pour y admirer les merveilleuses mosaïques,telle celle  de « Thésée et le Minotaure », celle « la minerve »,  « des paons » pavement de 4 métres sur 04 représentant  deux paons affrontés,un calice d’où s’échappent deux ceps de vigne. Les mosaïques « des poissons », ou de  « la florale » sont aussi deux œuvres antiques. Mais l’immense tableau de la mosaïque relatant « le mariage de Thétis et Pelée » , œuvre monumentale de 9.50 mètres sur 4.25 métres représentant deux scènes distinctes, l’une évoque  « le cortége de Thétis » et l’autre « la cérémonie du mariage », représentant  « Silène endormi et attaché par des Amours » ; on y distingue aussi des Néréides et des dieux marins ,où apparaît une déesse assise et somptueusement vêtue, tandis qu’un centaure clôt le cortége.

Autant d’histoires et d’œuvres antiques, qui sont bien de chez nous, que des touristes étrangers, viennent périodiquement visiter. Tandis que notre jeunesse ignore probablement jusqu’à leur existence.

HOUARI Larbi-journaliste

  • Illustration: carte postale ancienne

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