Cela s’est passé un 9 novembre 1956 Arrestation d’André Mandouze, militant pour l’indépendance de l’Algérie

Intellectuel engagé et profondément anticolonialiste, les ultras l’appelaient le « fellaga Mandouze ». Il sera arrêté pour atteinte à la sécurité de l’Etat pour s’être rangé clairement du côté des algériens.

 

Spécialiste de Saint Augustin, universitaire, journaliste, catholique de gauche, antifasciste et anti colonialiste, André Mandouze arrive en Algérie en 1946. Très vite, il prend conscience du drame qui se prépare et consigne ses sentiments dans la revue Esprit tout en dénonçant les agissements de la France coloniale.

Après le déclenchement du 1er novembre 1954, il affiche clairement sa sympathie pour le FLN et pour l’indépendance de l’Algérie. Provocateur, il attise la haine des ultras qui le traite de « traitre », notamment après le meeting du Comité d’action des intellectuels contre la poursuite de la guerre en Algérie, organisé en janvier 1956, à la salle Wagram, à Paris, où Mandouze lance à l’assistance : «Je vous apporte le salut de la résistance algérienne.»

Suite à ses mots, il voit souvent ses cours à Alger interrompus avant d’être carrément suspendus. Il est insulté et même agressé par les partisans de l’Algérie française, alors que sa famille est menacée. Les Mandouze quittent précipitamment l’Algérie au mois de mars 1956 et André est officiellement transféré à la Faculté des Lettres de Strasbourg. Poursuivant son combat par la plume autant que par la parole, son domicile est perquisitionné en son absence selon des méthodes policières musclées.

Peu de temps après la rentrée universitaire, le 9 novembre 1956, le « fellaga Mandouze », comme l’appellent les partisans de l’Algérie française, est arrêté par la Sécurité du Territoire et transféré à Paris. Inculpé pour atteinte à la sécurité de l’Etat, il est incarcéré pour cinq semaines à la prison de la Santé. Cellule 17, numéro d’écrou 9375. Et c’est suite à un grand mouvement de protestation qu’il sera libéré.

Il racontera ces semaines passées en prison pour l’Algérie dans « Solitude pour l’Algérie. Journal de cellule ». C’est ainsi que le 13 novembre, il écrit dans le Premier cahier : « Me voici en mesure de mettre par écrit mes premières impressions de taule. J’ai un cahier et un stylo à bille (modèle réglementaire). C’est-à-dire que professionnellement parlant, je me retrouve avec mes instruments de travail ordinaires ».

Poursuivant son combat durant toute la révolution, il signe un texte contre la torture pratiquée par les soldats français sur les nationalistes algériens. Document signé aussi par d’autres intellectuels tels qu’Henri-Irénée Marrou et François Mauriac. Il est, en septembre 1960, l’un des premiers signataires du Manifeste des 121, affirmant le droit à l’insoumission, et ne sera ni suspendu ni révoqué comme bien d’autres universitaires.

Quelques mois plus tard, en février 1961, il a publie chez François Maspero, « La Révolution algérienne par les textes » qui sera aussitôt saisi par la police, mais réédité en septembre de la même année.

Au lendemain de l’indépendance, le premier président de l’Algérie, Ahmed Benbella lui demande de revenir au pays pour réorganiser l’université au poste de directeur de l’Enseignement supérieur. Mais à l’arrivée de Boumedien, il met fin à sa « carrière » de « pied rouge » et repart définitivement en France. Il reviendra en Algérie en 1971 lors d’une soirée commémorative organisée à par la Faculté des Lettres, puis en avril 2001 pour présider un colloque sur saint Augustin, qui symbolise, à ses yeux, le lien entre africanité et universalité.

Quelques années plus tard, il s’oppose vivement à la loi du 23 février 2005, tentant de réhabiliter la colonisation française en Afrique du Nord, qualifiant la manœuvre de « scandaleuse ». Pour lui, c’est carrément « la preuve que le colonialisme est encore bien vivant dans l’esprit d’un certain nombre de gens qui regrettent que ce soit fini » et c’est légitime que cette loi soulève « l’indignation de ceux qui furent les colonisés, et celle de ceux d’entre nous, qui ont lutté pour mettre fin à l’exploitation d’autrui ».

André Mandouze est décédé le 5 juin 2006 à l’âge de 90 ans, à Porto-Vecchio (Corse-du-Sud).

Z.M.

Sources :

  1. « André Mandouze : A gauche toute ! » Portraits – par Daniel Bermond dans mensuel n°279 daté septembre 2003 à la page 32
  2. https://www.alsace-histoire.org
  3. André Mandouze « Un chrétien dans son siècle. De Résistance en résistances », Paris, Karthala, 2007,
  4. Horizons du 21 – 03 – 2012

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1 Comment

Harieche 9 novembre 2014 - 20 h 52 min

Je vous suis très reconnaissant du travail et de l’effort que vous êtes en train de faire pour nous éclairer sur l’histoire de notre pays, mille merci encore une fois et mes sincères salutations.

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