A l’ombre de l’acacia, je m’assois et admire ce temple à ciel ouvert. Nous sommes à présent à Affillel et cela fait près de trois heures que nous sillonnons le parc de l’Ahaggar qui existe depuis 1987 et change de dénomination par décret exécutif, le 21 février 2011, en prenant l’appellation officielle de Parc Culturel de l’Ahaggar.
Notre destination est perchée à plus de 2700 m au cœur du Sahara, à 80 kilomètres à vol d’oiseau de Tamanrasset. L’Assekrem est un incontournable, pour avoir été le lieu d’ermitage de Charles de Foucauld qui s’y installa en 1911. La végétation y est timide ; çà et là, au milieu de la roche, quelques plantes reliques subsistent, l’oseille y trône tel un vestige de la dense forêt d’autrefois et du climat méditerranéen, paradis du guépard, de la gazelle, de la girafe et du bubale.
L’immensité est notre terrain de jeu. Notre groupe est constitué d’une dizaine de personnes. Nous gambadons comme des enfants, courant et gesticulant à travers les sentiers, interrompant notre course folle par gais bavardages tantôt ponctués de solennels soliloques, tantôt suivis de longs ces moments de silences consentis. Sur notre chemin nous ne croisons ni nomades ni sédentaires. Néanmoins, les gravures rupestres attestent de façon indélébile, de la trace des premiers Hommes.
Les voitures garées, le sentier rétréci, nous poursuivons à présent l’ascension à pied. L’altitude, le manque d’air nous engourdissent, mais il faut garder le pas leste car le soleil se couche bientôt, il luit d’une chaude lumière ocre. Le couchant jette sur l’Assekrem une couleur feu, une couleur flamme ! Muets devant l’éphémère éternité, à contempler les dernières lueurs du jour fuyant vers l’autre hémisphère. Les idées défilent s’enchevêtrent, le vent souffle, l’air glacial s’installe et balaye les certitudes les plus grandes.
Et puis, et puis… plus rien. Une sérénité dérangeante, un ciel qui me tombe sur la tête, une lune fière, opaline et laiteuse, chasse et occulte par sa beauté les autres astres, ternit par sa pleine présence. Seule l’étoile du berger, audacieuse et solitaire, demeure dans les cieux. Nous descendons vers le refuge, un lieu charmant et authentique où la modeste cheminé est l’espace le plus adulé et convoité du salon.
Le dîner fut abordé avec gourmandise et avidité, les mets tant attendus Arrivent ! Le zenbou brûlant et fumant : une soupe traditionnelle à base de blé complet, ail et huile d’olive, suivis d’un couscous touareg à la sauce rouge onctueuse sucrée-salée et viande rouge, et pour clore dignement ce bal des saveurs, les dattes juteuses et charnues nous sont offertes en dessert. Durant ce temps-là, sur des braises ardentes, notre thé infuse, son arôme épicé titille les narines. Un breuvage dont la saveur va crescendo, la soirée se poursuit, charmante, délicieuse, d’autres groupes de touristes se sont greffés au notre, tous bercés par les notes envoûtantes du Blues targui.
Il est des lieux dont l’immensité accentue la petitesse des personnes que nous sommes. Nous voilà donc devenus insignifiants, confrontés à notre condition de simples êtres vivants.
Leila A