Aïssat Idir naît le 7 juin 1919 à Djamaâ Sahridj, village situé près de Tizi Ouzou, au sein d’une famille paysanne de condition modeste. Il fait ses études primaires dans son village et les poursuit à l’Ecole Normale de Bouzeréah. Puis il est affecté au lycée français de Tizi Ouzou où il demeure jusqu’à l’obtention du diplôme de premier cycle de l’enseignement secondaire. Mais la situation économique de ses parents ne lui permet d’aller plus loin. Forcé de quitter l’école, il rejoint son oncle paternel à Tunis, en 1935, pour suivre des études supérieures en économie, à l’Université de Tunis.
En 1944, Aïssat Idir entre à l’usine d’aviation et est rapidement promu au grade de chef du service de contrôle administratif. L’administration de l’usine l’envoi ensuite au Maroc pour occuper les mêmes fonctions à l’aéroport de Casablanca.
C’est dans ce milieu que son âme de syndicaliste apparaît, notamment en s’intéressant à la défense des intérêts des travailleurs algériens. Ses camarades l’élise comme membre de la commission exécutive des travailleurs du secteur d’Etat, affiliée aux syndicats communistes français.
Dans le cadre de son activité syndicale au sein de cette commission, il réalise que les syndicats français même communistes n’accordent pas le même intérêt aux problèmes du travailleur algérien qu’aux préoccupations des travailleurs européens.
A son retour en Algérie, l’idée de fonder une organisation syndicale algérienne commence sérieusement à le préoccuper. Les idées d’Aïssat Idir suscitent des réserves de la part des syndicats français, lesquelles commencent à œuvrer pour l’écarter des postes de responsabilité.
En 1951, la police française prend d’assaut l’usine où il travaille. Il est arrêté avec 10 autres travailleurs algériens. Ils ne seront libérés que dix jours plus tard.
Par la suite, Aïssat Idir occupe un autre emploi à la caisse d’allocations familiales du secteur du Bâtiment et Travaux Publics et devient responsable du comité central des affaires syndicales relevant du Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques (MTLD) de 1949 à 1954.
Son action pour développer le syndicalisme algérien lui vaut une deuxième arrestation.
Les efforts d’Aïssat Idir ainsi que ses démarches sont d’une influence considérable sur la création en février 1956 de la première organisation syndicale algérienne : l’Union Générale des Travailleurs Algériens dont il est nommé secrétaire général.
L’engouement pour le syndicat est immédiat. Dès le premier mois, plus de cent mille adhésions sont enregistrées. Le siège de la Centrale syndicale, installé à La Vigerie (actuellement El Madania), à Alger, commence à accueillir des délégations de syndicalistes venues protester auprès d’Aïssat Idir de leurs difficiles conditions de travail.
Le secrétaire général, fraîchement élu, se consacre par ailleurs à la mise en place des structures de l’UGTA. Ensuite est créé le journal de l’organisation syndicale, L’Ouvrier algérien, qui permet de tenir les travailleurs informés sur les actions menées par la Centrale syndicale et de les mobiliser pour la lutte armée. Le 22 mai 1956, sur ordre de Robert Lacoste, ministre –délégué en Algérie, la police française arrête Aïssat Idir dans son bureau à la Centrale syndicale avec d’autres cadres et militants de l’UGTA. Il est incarcéré à Berrouaghia, puis déplacé dans d’autres prisons : Saint-Lo, Aflou, Bossuet et enfin, transféré à Alger pour être enfermer à la prison de Barberousse. Aïssat Idir subira d’atroces tortures ordonnées par le colonel Godart, qui dirigeait alors la DST (Défense et sécurité du territoire).
Inculpé d’atteinte à la sécurité de l’Etat, il sera traduit avec vingt-deux autres syndicalistes devant la justice militaire à Alger. Innocenté, malgré l’acharnement de la justice, il est libéré mais pas pour longtemps. Le 13 février 1959, il sera encore arrêté par le colonel Godart et emprisonné. Il subit encore d’atroces tortures et l’administration pénitentiaire est contrainte de le transférer à l’hôpital militaire Maillot. Un avocat de la défense, qui a pu le visiter, a déclaré que ses jambes avaient été grièvement brûlées. Les autorités françaises, embarrassées, ont donné des versions contradictoires sur l’origine de ces brûlures. Mais Aïssat Idir meurt le 26 juillet 1959.
L’assassinat du secrétaire général de l’Union Générale des Travailleurs Algériens suscite une large vague d’indignation et de colère de par le monde. Des télégrammes de protestation et de réprobation sont adressés par l’Organisation Mondiale des syndicats libres, la Ligue Mondiale des syndicats, l’Union internationale des agriculteurs et des syndicalistes arabes, ainsi que des syndicats communistes français.
Ces instances ne se contentent pas de protester mais exigent du gouvernement français de faire toute la lumière sur les circonstances obscures de son décès.
la Confédération internationale des syndicalistes libres (CISL) qui a demandé l’ouverture d’une enquête sur la mort de Aïssat Idir déclare : «Dans toute l’histoire brutale de la répression du mouvement nationaliste algérien, aucun événement n’a pu contribuer à soulever l’indignation des hommes de bonne volonté et, en particulier, des travailleurs organisés ».
Mais toutes les protestations et les demandes restent lettres mortes…
Synthèse K.T.
Sources :
- https://www.vitaminedz.com/biographie-d-aissat-idir/Articles_15634_82536_15_1.html
- https://djemaa-saharidj.jedecouvrelalgerie.com/culture/aissat-idir.html
- https://www.djazair50.dz/?Le-30-juillet-1959-La