Soufisme ou suffisme – qu’importe la transcription latine ou la prononciation de ce mot d’origine arabe – où la voyelle n’est pas discriminatoire.
« Attasaouf » est un nom passif celui qui subit l’action de « souf » la laine rude par opposition à la soie et au coton symbole d’opulence et de douceur. Le nom vient aussi de la référence commune à tout pratiquant de la « Tariqua » – la conduite, dont le Prophète qui était un soufi et s’habillait de souf pour s’isoler et méditer avant la révélation et qui l’est resté jusqu’à sa mort. Il a mené une vie de d’abstinence, de prière, de pureté et d’Amour pour ses femmes, son voisinage, ses semblables et Dieu. Il est considéré comme le premier maître de « Attasaouf ».
En effet le soufi se rend à Dieu dans un dépouillement total dégagé de toute velléité. Seuls, la Crainte de Dieu, le renoncement au monde, le jeûne, la prière et la veille nocturne caractérisent ces ascètes. C’est l’élan d’Amour vers le Créateur, cette soif absolue de l’amoureux transi pour l’objet de son amour – « Ach-chawq » le désir et le manque de « Huwa » « Lui » – qui est présent chez le soufi, et dont il désire « la Face de Dieu ». Tel est le premier pas sur le sentier sûfi.
Alors commence le voyage de l’âme. Roûmi dit : « Dans le cœur passe une image : ‘Retourne vers ta source’. Le cœur s’enfuit de tous côtés, loin du monde des couleurs et des parfums, en criant : ‘ Où donc est la source ? ‘ et en déchirant ses vêtements par amour ».
La Beauté divine est alors perçue comme l’essence du « Tout » beau et du « Tout » harmonieux. Dans les panégyriques soufis, celle-ci est souvent représentée par un personnage féminin, Leïla, Maya, Nafissa, etc. ; l’Amour spirituel, l’Elixir divin et l’Ivresse des amoureux sont des symboles que les soufis utilisent pour dépeindre leurs états âmes. Et ils sont rompus à décrire avec exactitude leurs sensations même dans la vie courante.
Dans le cadre d’un raisonnement cartésien/newtonien, de tels états paraissent relever de la psychose or, il n’existe, pour l’instant, que cette référence pour décrire la santé mentale. Cédons la parole à S. Grof : « Une personne fonctionnant exclusivement sur le mode cartésien, peut être exempte de symptômes manifestes, mais ne peut pas être considéré comme mentalement saine. De tels individus mènent une vie centrée sur leur ego et la compétition, orientée vers un but. Ils ont tendance à être incapable de tirer satisfaction des activités ordinaires et ils sont éloignés de leur monde intérieur. Pour ces gens […] aucun degré de richesse, de pouvoir ou de célébrité n’apportera de satisfaction authentique. »
En effet, les humains comme les plus infimes particules sont une complémentarité.
Sources :
– Leïla Zouggari, – L’Amour Dieu ou le Soufisme – extrait : L’Amour et la Connaissance – éd , Lierre & Coudrier 1997.
Illustration : « Le Derviche tourneur » (1899), de Jean-Léon Gérôme. Collection particulière.