Dès les premières images, on est replongé dans un climat de terreur. Rachida, la vingtaine, belle comme le jour, est institutrice. L’un de ses anciens élèves l’aborde devant l’école et lui demande de poser une bombe. Elle refuse. Il lui tire dessus. C’est le début d’un long cauchemar pour elle et pour sa mère.
Lors de sa sortie algérienne, en 2002, à El Mouggar, toute la salle retenait son souffle. Les mots, les images, l’ambiance, tout y était. Nous sortions tout juste de la décennie noire- les tombes des victimes étaient encore fraiches et le terrorisme n’était toujours pas éradiqué- sans nous demander dans quel état nous étions. En 2002, nous étions déjà dans l’oubli, peut être même dans le déni. Mais « Rachida » nous renvoyait au visage toute la souffrance et toute l’horreur que nous avions traversées comme des zombies. Toutes ces années où nous comptions nos morts et attendions la notre. C’est comme si nous prenions conscience, quasiment pour la première fois, de l’ampleur de la catastrophe. A travers une caméra neutre qui se contentait de relater la tragédie vécue par une jeune femme. A la fois anonyme et familière. Car Rachida représentait toutes les enseignantes tuées, toutes les femmes assassinées par les terroristes islamistes.
« Rachida » résume l’absurde, l’inconcevable et l’injuste sort des algériens durant plus d’une décennie. Mais la fin est, plus qu’une simple note d’espoir, un symbole de la résistance de tout un peuple face à la barbarie.
Il faut notre aussi que le jeu de l’actrice principale, Djouadi Ibtissem, dans le rôle de Rachida est exceptionnel. Elle épouse à la perfection son personnage et jongle parfaitement avec les émotions, de la peur à la douleur, en passant par la colère, l’incompréhension, la détermination… Elle est simplement poignante. Tout comme Bahia Rachedi, jouant admirablement cette mère qui ne se résigne pas, même si elle se sent impuissante face au sort.
Z.M.