Cela s’est passé un 28 juin 1835 … La bataille d’ El-Megta’â

La bataille d’ El-Megta’â, ou de la Macta oppose les forces du général français Trézel et celles de l’émir Abdelkader. Ce dernier inflige aux troupes françaises une cuisante et mémorable défaite.

Deux jours auparavant, le général Trézel sortit d’Oran à la tête d’une petite division composée d’un bataillon du 66e, d’un bataillon du 1er de ligne, du 2e régiment de chasseurs d’Afrique, d’un bataillon et demi de la légion étrangère, et d’une batterie de campagne; en tout deux mille cinq cents hommes. Avec ces forces, il se proposait d’attaquer celui qui déjà se proclamait le souverain maître de l’Algérie.

Le général s’établit au camp du Figuier, à deux lieues au sud d’Oran; couvrant ainsi toute la partie du pays où s’étaient réunis les Douers et les Zmelas, alliés des français. De sa position, il écrivit à l’Emir Abdelkader pour le forcer à renoncer publiquement tout droit de suzeraineté sur ces tribus.

L’Emir répondit à ce message, que sa religion ne lui permettait pas de laisser des musulmans sous la domination française et qu’il ne cesserait de poursuivre les tribus rebelles partout où elles se réfugieraient. C’était une déclaration de guerre. Le général Trézel demanda des instructions d’Alger mais n’en reçut pas. Pour lui, se retirer signifiait l’abandon des tribus alliées et ternir le drapeau français. Après quelques hésitations, il se décida à prendre l’offensive.

Les troupes françaises sortirent de leurs retranchements à quatre heures du matin, et s’engagèrent dans la forêt Muley-Ismaël. L’avant-garde, commandée par le colonel Oudinot, ne se composait que de deux escadrons de chasseurs et trois compagnies de la légion étrangère. Assaillie tout à coup par la nombreuse cavalerie de l’Emir Abdelkader, elle se trouva en un instant enveloppée de toutes parts ; le colonel Oudinot essaya plusieurs fois de rallier ses troupes ébranlées, mais il tomba mortellement frappé d’une balle. Alors, chasseurs et fantassins se replient en désordre sur le gros de la colonne; le 66e, qui formait le centre, était lui-même attaqué, la panique s’empare de lui, et il plie à son tour. Mais le général réussit à rétablir l’équilibre et à s’en sortir avec seulement 52 hommes tués et près de 300 blessés.

Après un grand désordre parmi les soldats, la journée se passa à observer l’ennemi qui, quatre fois plus nombreux, se tenait derrière ses retranchements. Cette impassibilité détermina le général Trézel à opérer son mouvement de retraite. Le bataillon d’infanterie légère d’Afrique prit la tête de la colonne; venait ensuite le convoi, sur trois files de voitures, et flanqué à droite et à gauche par deux compagnies de la légion étrangère et deux escadrons de chasseurs d’Afrique. L’arrière-garde, commandée par le lieutenant-colonel Beaufort, se composait du bataillon du 66e de ligne et de deux escadrons de chasseurs. Ce fut dans cet ordre que l’armée, entourée de tirailleurs, s’avança dans la plaine de Ceïrat. Dès qu’il la vit s’ébranler, l’Emir Abdelkader se mit à sa poursuite avec huit à dix mille cavaliers et quinze cents fantassins.

Malheureusement, au lieu de suivre la route qui conduit directement à Arzew, le général Trézel préféra déboucher dans le golfe par les gorges de l’Habra, à l’endroit où cette rivière, sortant des marais, prend le nom de la Macta. Au premier coup d’œil, l’Emir s’aperçut de la faute que commettait son adversaire, et lança à toute bride des cavaliers pour occuper le défilé. A peine l’avant-garde y fut-elle engagée, qu’une grêle de balles et de pierres vint l’assaillir. Après des efforts inouïs, poursuivis sans cesse et harcelés par l’ennemi, les soldats français se replièrent tumultueusement sur le gros de l’armée et y jetèrent le plus grand désordre. L’arrière-garde, tout à coup détachée du centre, fit un mouvement en avant pour joindre la tête de la colonne, et laissa le convoi à découvert. Alors l’épouvante gagne tous les détachements.

Vainement la voix du général se fait entendre, partout elle reste sans pouvoir; les soldats jettent leurs armes, les hommes du train des équipages coupent les traits de leurs chevaux et abandonnent les caissons ; la déroute est complète. Leurs caissons de vivre seront pillés, les blessés achevés.

Des soldats français se réfugient sur un mamelon, bientôt suivis par le plus gros des troupes. Quelques attaques à coups de canon à mitraille se poursuivent quelques instants avant un retrait sans désordre.

Pour les troupes françaises, cette bataille aura couté la mort de 352 hommes, 380 blessés, ainsi que des prisonniers et du matériel. D’autres sources avancent les chiffres de 1 000 morts et quelque 1 500 blessés.

L’Emir Abdelkader, alors âgé seulement de 27 ans, a fait preuve d’une grande intelligence. Il a usé d’une tactique militaire d’un style nouveau et révolutionnaire, défiant toutes les stratégies militaires usuellement admises à l’époque.

Synthèse K.T.

Sources :

  • L’Algérie ancienne et moderne, par M. Léon Galibert. Furne et Cie Libraires-Editeurs, 1843.
  • «Annales Algériennes» – Edmond Pellissier de Reynaud. Première édition-Tome I, 1836.

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