Pour redorer son blason et renforcer son pouvoir, Charles X annonce l’expédition d’Alger en mars 1830, modifiant ainsi l’avenir de tout un peuple.
A cette période là, la France vit une situation politique très tendue : Charles X qui rêve de rétablir la monarchie absolue et son gouvernement ultra est particulièrement impopulaire ; la bourgeoisie libérale désire accroître les pouvoirs du parlement et son audience est de plus en plus grande. C’est dans cette ambiance délétère que l’affaire d’Alger se présente à Charles X qui y voit la meilleure façon de redorer son blason et de préparer des élections favorables.
Le 2 mars 1830, lors de l’ouverture de la session parlementaire, le roi annonce l’expédition contre Alger : « Au milieu des graves événements dont l’Europe était occupée, j’ai dû suspendre l’effet de mon juste ressentiment contre une puissance barbaresque ; mais je ne puis laisser plus longtemps impunie l’insulte faite à mon pavillon ; la réparation éclatante que je veux obtenir, en satisfaisant à l’honneur de la France, tournera, avec l’aide du Tout-Puissant, au profit de la chrétienté. » ainsi, officiellement, il est question de venger l’offense faite au consul, de détruire la piraterie et de libérer les esclaves blancs- et non utiliser le prestige d’une victoire militaire pour battre l’opposition dans les urnes !
Pierre Michelbach raconte que le gouvernement «arrêta ses idées sur une expédition militaire qui offrît à la fois de la gloire à l’année, de grands avantages au pays, et qui vint frapper les imaginations par la grandeur et l’étrangeté de son but : la conquête d’Alger remplissait toutes ces conditions. On y trouvait tout le merveilleux des croisades, la nationalité de l’expédition d’Égypte, et l’éclat des victoires de Fernand Cortez. Elle délivrait l’Europe de la plus humiliante servitude; elle servait la cause de la morale et de l’humanité; elle devait offrir à l’agriculture, au commerce, à l’industrie et à la civilisation, d’immenses moyens de succès, et, à l’ambition, un des plus beaux pays du globe et les richesses d’une ville qui, depuis trois cents ans, enfouissait les trésors de la chrétienté et le fruit des rapines et des brigandages de ses habitants».
On dénonça cette expédition qualifiée de « liberticide » et on s’en prit aux hommes qui devaient en assumer le commandement, notamment à Bourmont, ministre de la Guerre, à qui échut la responsabilité des opérations. On rappelait aussi que toutes les tentatives faites depuis trois siècles pour prendre Alger avaient échoué.
Pour parer et répondre aux nombreuses critiques, les services du ministère de la Guerre fera rédiger et imprimer un « Aperçu historique, statistique et topographique sur l’Etat d’Alger ». Destiné à l’usage de l’armée expéditionnaire d’Afrique, dont il fallait soigner le moral, prévenir les imprudences et satisfaire la curiosité, cet ouvrage de propagande n’en est pas moins une remarquable source historique qui résume ce qu’on savait, ou croyait savoir, de l’Algérie, en 1830.
Quelques mois plus tard, la flotte d’invasion quittera le port de Toulon avec 37 000 hommes à son bord. Alger sera prise, puis tout le pays. Sa colonisation, son histoire récente, s’est jouée sur un échiquier dont les codes avaient été modifiés.
K.T.
Sources :
- «La prise d’Alger », un article de Pierre Michelbach (Agrégé d’histoire et spécialiste d’histoire sociale), publié dans Les collections de l’Histoire, n° 11, avril 2001, « Le temps des colonies ».
- algerazur.canalblog.com
- Illustration : Attaque d’lAlger par la mer, 29 Juin 1830, par Théodore Gudind