Ils sont six à exposer et ont en point commun d’être nés dans les années 50 et d’avoir commencé à exposer au début des années 80, d’où le nom de l’exposition.
Arezki Larbi, Mostafa Goudjil, Akila Mouhoubi, Mustapha Nedjaï, Malek Salah et Hellal Zoubir. Ils sont tous nés dans les années 1950 et ont « vécu » la guerre de libération. En juillet 1962, ils étaient de jeunes adolescents et ont certainement scandés des slogans de joie aux côtés des adultes.
Emergés au début des années 1980, ils ont connus les pénuries, l’éclosion de « monument » et les émeutes d’octobre 1988.
Contrairement aux artistes qui les ont précédés, leur quête était individuelle et non collective.
Dans le catalogue de l’exposition « Les 80 », Ameziane Ferhani explique très bien le contexte, les motivations et les spécificités de cette génération, représentée par ces six artistes. Selon lui, « ils expriment plutôt des identités individuelles qui reconnaissent leur appartenance mais ne la mettent pas en avant », contrairement à leurs prédécesseurs qui « visaient d’une manière ou d’une autre à exprimer une identité collective menacée ». Ainsi, ces artistes nés dans les années 1950 illustrent, selon le texte, l’évolution de la société algérienne ainsi que son passage progressif de la ruralité à l’urbanité.
Ainsi l’objectif de cette exposition, loin de toute nostalgie, se veut une illustration d’une époque charnière où les arts plastiques- malgré de nombreuses difficultés- étaient particulièrement présents dans la vie de tous les jours, celle des bouleversements sociaux, économiques et politiques. Les artistes des années 80 ont donc cette particularité d’avoir accompagné cette période et les suivantes.
Ameziane Ferhani titre son texte avec une équation très significative : 50 + 80 = 21. Ce qui revient à dire « qu’étant nés dans les années 50 et étant apparus dans les années 80, ils sont de mantes manières les passeurs talentueux de l’art algérien vers le 21e siècle » et ils sont, de ce fait, des artistes pleinement de leurs temps qui n’est pas achevé.
Sur les murs blancs de l’Espace d’Art Contemporain d’El Achour, les œuvres de ces six artistes n’ont quasiment rien de commun. Chacun d’entre eux regarde dans une direction et chacun exprime, donc, sa vision.
Seuls Akila Mouhoubi et Zoubir Hellal nous font voir des toiles datant des années 80. Les quatre autres exposent des œuvres plus ou moins récentes, toujours pour dire que ces artistes sont de leur temps, de l’époque et d’aujourd’hui.
Dans le catalogue, Zoubir Hellal, à la fois exposant et commissaire de l’exposition, précise que durant les années 80, « les peintres vont se référer aussi bien à la tradition qu’à la culture ancestrale et moderne pour s’adresser au public », alors que d’autres « remettent en cause les notions d’originalité de l’œuvre d’art et de l’hégémonie de l’art occidental ». Et c’est justement ce qu’on retrouve dans cette exposition : différents styles, diverses influences, plusieurs techniques, avec des regards qui cassent déjà ou toujours avec l’œuvre d’art classique.
C’est d’ailleurs cette génération, toujours en service, qui marquera probablement le plus les artistes suivants, ceux qui viendront après démontrer à leur tour que l’art n’a pas de limites et ne souffre d’aucune règle fixe. Après avoir marqué la rupture avec leurs prédécesseurs, ils passent le témoin à leurs successeurs tout en restant dans la course !
Z.M.
L’exposition « Les 80 » est visible durant tout le mois de juin à l’Espace d’Art Contemporain d’El Achour
Résidence CMB 196, Oued Terfa. El Achour. Alger. T/F : 023 24 39 27.