Nous apprenons avec tristesse le décès de François Maspero, le 11 avril 2015 à Paris. Maspero qui fut toujours épris d’un monde de liberté et de savoir où les cultures se partagent sans ostracisme ni rejet.
C’est la perte d’un immense ami de l’Algérie en lutte, grand personnage par son engagement, ses choix de vie et son combat. Il avait beaucoup travaillé pour que les livres dans sa maison d’édition puissent permettre de donner la parole à ceux qui en eurent besoin, à ceux qui n’y avaient pas droit, à ceux dont « le monde libre » cachait l’histoire ou le destin à l’intérieur de ses archives retirées qui moisissaient dans l’ombre.
En pleine lutte de libération nationale, François Maspero qui était libraire, fit œuvre d’engagement et de militantisme pour œuvrer à l’indépendance de l’Algérie, ce pays qu’il respectait et dont il avait défendu la lutte. Il créa les Editions Maspero en 1959 et la guerre d’Algérie y fut l’un des thèmes majeurs. Il édita Frantz Fanon et plusieurs ouvrages sur l’Algérie. Les éditions Maspero publièrent également plusieurs livres notamment sur le colonialisme, le socialisme et le marxisme et publia des auteurs du monde entier. François Maspero fut également écrivain et traducteur.
Dans une interview donnée à Bron Magazine, on pourra lire :
Bron magazine : « Votre histoire familiale, mais aussi l’Histoire forgent vos engagements. La colonisation, la guerre d’Algérie en particulier sont des éléments fondateurs de votre itinéraire ?
François Maspero : En fait la seule chose que j’ai préparée, c’est un certificat d’ethnologie qui incontestablement ouvert au monde : j’ai été mis abruptement devant le fait colonial, cela m’a beaucoup marqué. Mon père avait déjà tracé la voie. Dès l’âge de 22 ans j’ai travaillé pour une imprimerie, puis je suis devenu libraire.
Pour l’Indochine j’étais trop jeune, mais pour la guerre d’Algérie, j’étais en pleine action. La guerre d’Algérie m’a conduit à produire des textes, pas seulement de réprobation morale, comme les Editions de Minuit, mais des textes qui donnaient vraiment la parole aux Algériens, j’ai eu la chance de pouvoir publier Frantz Fanon et bien d’autres livres… Ce qui m’a valu de nombreuses inculpations et plusieurs attentats contre ma librairie.
L’attitude et la voie choisie par François Maspero ont donné à toute la jeunesse algérienne qu’il a accompagnée avec ses ouvrages édités durant la période de la lutte de libération nationale, au lendemain de l’indépendance et après, un exemple de grande droiture et de choix de vie.
Nous saluons le militant, résistant, François Maspero, passeur de livres et d’idées. Nous rendons hommage à ses engagements et à sa lutte pour une vie de liberté, de droit, de justice et d’équité.
Ali Sayad
- Article publié le 13.04.15 in https://www.alger-republicain.com